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Bachelors : pourquoi tant de succès ?

Étienne Gless Publié le
Bachelors : pourquoi tant de succès ?
Toulouse Business School // ©  Christian Rivière
Depuis quelques années, les bachelors attirent de plus en plus d'étudiants. Construction d'un parcours par étapes, demande des recruteurs mais aussi programme rentable pour les écoles de commerce et marché non régulé... Décryptage d'un engouement tant du côté des jeunes que des établissements, à l'occasion de la publication du palmarès des bachelors de l'Etudiant mardi 10 février 2015.

Un chiffre permet de mesurer l’ampleur du phénomène bachelor : Toulouse Business School a intégré 391 nouveaux étudiants en première année de son bachelor en management à la rentrée 2014. Un record. L’école de commerce toulousaine compte les plus gros effectifs en France de ce type de formation avec près de 1.400 inscrits dans ses programmes bac+3.

Combien existe-t-il de bachelors aujourd'hui ? Plusieurs centaines mais un comptage précis est difficile : l'appellation "bachelor" n'a rien d'officiel mais le terme fait florès. Le marché a explosé depuis six ou sept ans. Au-delà du commerce, on trouve des bachelors dans les domaines du tourisme, du voyage, du luxe, de la finance, du digital, du sport ou de l'événementiel. Un essor qui ne doit pas qu'à l'engouement des jeunes.

un parcours par étapes

"La difficulté des universités à faire réussir les étudiants en licence a créé un appel d'air vers les formations de type bachelor, analyse Stéphan Bourcieu, directeur de l'ESC Dijon. Un nombre croissant d'étudiants et de familles préfèrent investir dans ce type de formations bac+3 moins coûteuses qu’un master en école de commerce et offrant une bonne employabilité." Une manière aussi pour les étudiants de construire leur parcours par étapes : d'abord un bachelor puis un master. Les frais de scolarité, eux, s'élèvent de 4.000 à 8.000 euros.

des entreprises À la recherche de bac+3

La crise est passée par là. Beaucoup d'entreprises ne peuvent plus s'offrir les services de diplômés bac+5, notamment les PME-PMI. Elles trouvent dans les bachelors des bons diplômés directement opérationnels. Pour les recruteurs, le diplômé bac+3 est une solution de rechange avantageuse. Il est un peu moins gourmand financièrement  (27.000 euros de salaire annuel moyen brut contre 35.000 euros pour un diplômé de master en management) et  il possède les expertises de base attendues d'un diplômé d'école de commerce.

Le diplômé d'un bachelor est aussi très bien "calibré" pour certains secteurs : dans la banque, le nombre de niveaux hiérarchiques s'est réduit. Les conseillers clientèle recrutés à bac+5 piétinent avant de se voir proposer des évolutions de carrière, ce qui génère des frustrations. Après avoir chassé des années durant des bataillons de bac+5, le secteur bancaire commence à recruter des bac+3. De même, la grande distribution pour des postes de chef de rayon.

Une bonne affaire pour les écoles 

Le bachelor, un programme rentable pour les grandes écoles de commerce ? L'équilibre économique d'un bachelor serait beaucoup plus favorable que celui d'un master grande école, très budgétivore du fait de l'embauche de professeurs permanents titulaires d’un doctorat, de stature internationale. "Est-ce qu’on fait beaucoup d’argent avec le bachelor, la réponse est non. Mais est-ce que l’on gagne malgré tout de l’argent avec le bachelor, la réponse est oui", se défend Stéphan Bourcieu. Olivier Aptel, le directeur de l'ESC Rennes, le confirme : "Notre programme bachelor est contributif net au même titre que les programmes Msc (master of science)."

Toutefois, nombre de directeurs relativisent. Pour obtenir le visa, la CEFDG (Commission d'évaluation des formations  et diplômes de gestion) impose des taux de couverture par des professeurs permanents. Or c’est ce taux qui coûte cher dans une formation…

un vivier d'étudiants pour le master

"Le bachelor est un moyen de sécuriser le recrutement de notre master grande école et ainsi d’asseoir notre équilibre économique", confie le directeur d'une business school du sud de la France. Une grande majorité des diplômés bac+3 souhaitent poursuivre leurs études. Pour des raisons de prestige, les grandes écoles de commerce recrutent des étudiant de prépa, mais elles doivent dépenser beaucoup en marketing afin de se démarquer des autres écoles. Quand l'une d'elles repère qu'un étudiant de son programme bachelor veut poursuivre ses études à bac+5, elle peut, selon les cas le préparer à un concours d'admission parallèle ou lui proposer directement une place dans l'un de ses programmes.

À l'ICN, par exemple, 70% des diplômés d'un bachelor poursuivent en master, dont 40% dans l'un des programmes de l'école. Pour Stéphan Bourcieu, pas de doute : "Nous avons tout intérêt à développer ce marché parallèle."

un marché non régulé... pour le moment

Bien des bachelors présents sur le marché ne sont pas reconnus par l’État. Seules une vingtaine de ces formations au niveau bac+3 et une dizaine au niveau bac+4 possèdent le précieux visa. Or, pour la CEFDG, ce label ne suffit pas face à l'inflation de ces programmes. "Il ne permet pas une grande différenciation entre les bac+3", reconnaît Véronique Chanut, présidente de la commission.

Pour aller plus loin dans l'évaluation, l'instance a été chargée en 2014 par le secrétariat d'État à l'Enseignement supérieur et à la Recherche d'étudier la faisabilité de délivrer un grade de licence sur le modèle du grade de master. Une labellisation qui se fait attendre...

Étienne Gless | Publié le