L'école d'économie de Toulouse (TSE - Toulouse School of Economics) fait son entrée dans le classement de Shanghai 2015. C'est une bonne surprise ?
Nous sommes ravis. TSE fait partie de l'université Toulouse 1 – Capitole et quand un membre de la famille réussit, toute la famille se réjouit ! Cela vient récompenser une politique que nous menons depuis une quinzaine d'années, avec un recrutement focalisé sur les publications internationales. Le prix Nobel [qui fait partie des critères de Shanghai] de Jean Tirole n'est pas tombé par hasard.
Dans le milieu, tout le monde sait que TSE fait partie de Toulouse 1, mais le grand public ne fait pas forcément le lien, c'est dommage
N'est-ce pas étonnant de voir classée dans Shanghai une composante de Toulouse 1, alors qu'elle-même est absente du palmarès ?
Depuis que Shanghai produit un classement "économie-affaires" [palmarès par secteur], Toulouse 1 figure dans les "100 à 150e" meilleurs établissements. En 2013, nous étions même apparus dans les 100 meilleurs, dans la même zone qu'HEC. En 2015, nous faisons un bond : TSE entre directement à la 35e place, ce qui nous permet de prendre la première position des établissements français, devant l'Insead, et de nous classer parmi les premières institutions européennes.
J'ai toutefois un regret bien sûr : que l'université n'apparaisse pas nommément, alors que TSE n'en est qu'une composante, avec un statut comparable à celui d'un IAE. Les étudiants de TSE s'inscrivent à Toulouse 1 et le corps professoral dépend de l'université. Dans le milieu de l'enseignement supérieur, tout le monde sait que TSE fait partie de Toulouse 1, mais le grand public ne fait pas forcément le lien, c'est dommage.
Pourquoi le classement n'a-t-il pas repéré l'université dans son radar ?
Les auteurs du classement de Shanghai ne creusent pas forcément jusqu'à aller voir de quel établissement dépendent précisément les chercheurs signataires des publications répertoriées. On peut les comprendre quand on voit la complexité de notre système.
Justement à TSE, les 150 enseignants-chercheurs qui composent le corps professoral signent tous leurs publications sous le vocable "TSE". En revanche, si l'immense majorité d'entre eux signent également "Université Toulouse 1 – Capitole", une grosse trentaine de chercheurs du CNRS ou de l'Inra - de facto, d'importants publiants - accolent eux à TSE le nom de leur organisme. Bien que ce soit l'université qui les héberge…
Nous avons réalisé des simulations de classement et nous perdrions des places à être présents en tant que Comue
Mais ils sont rattachés à leurs organismes…
Bien sûr, un chercheur du CNRS qui travaille chez nous est payé par le CNRS. Mais qu'en est-il de ses conditions de travail ? Un chercheur a besoin d'infrastructures pour exercer son activité, d'un bureau, d'un téléphone, d'électricité, de fonds documentaires... Tout ça lui est fourni par l'hébergeur, c'est-à-dire l'université !
Alors certes, ils ne sont pas de l'université, mais si l'on veut améliorer la visibilité des universités françaises, il faudrait se mettre d'accord avec les organismes pour que tous ces chercheurs signent tous d'un même trait, du nom de leur hébergeur. À mon sens, c'est une des clés pour que les universités progressent rapidement dans les classements internationaux. C'est dans l'intérêt de tous, puisqu'aujourd'hui seules les universités sont classées, pas les organismes. Dans un contexte mondial, c'est une démarche de marketing qui sert l'intérêt du pays.
N'est-ce pas contradictoire de voir une structure si "petite" comme TSE se démarquer à Shanghai, alors que la politique de regroupement menée actuellement [fusion, Comue, association] vise justement à atteindre cette meilleure visibilité à l'international ?
Je ne crois pas que les Comue (Communauté d'universités et établissements) soient la solution pour assurer une visibilité aux universités françaises. Nous avons, nous-mêmes, réalisé des simulations de classement, et nous perdrions des places à être présents en tant que Comue. Si on regarde les 10 premières universités mondiales, aucune ne dépasse les 18.000 étudiants. Ce n'est donc pas la taille qui compte.