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Budget 2013 : les écoles privées associatives face à un ministère impassible

Sophie Blitman Publié le
Budget 2013 : les écoles privées associatives face à un ministère impassible
Le Sénat - DR // ©  Sénat
Alors que le projet de loi de finances 2013 doit être voté au Parlement dans les prochains jours, les écoles associatives privées dénoncent la réduction des subventions publiques, et plus largement, un manque de reconnaissance à leur égard. Le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, lui, relativise l'effort demandé aux établissements.

Voilà plusieurs semaines que les écoles associatives privées alertent les pouvoirs publics sur les difficultés financières auxquelles elles vont se trouver confrontées. A quelques jours du vote définitif du projet de loi de finances 2013, les inquiétudes de ces quelques 60 écoles se font plus pressantes.

Baisse des subventions publiques


76,9 M€ en 2010, 81,9 M€ en 2011, mais 80,5 M€ en 2012
: l'évolution de la subvention versée par l'Etat aux écoles associatives privées faisait déjà grincer des dents. En cause : un gel des finances du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche ainsi qu'une réduction de moitié de la subvention accordée par le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle. Un agacement qui croît pour le budget 2013 avec la suppression totale annoncée de cette subvention, tandis que le MESR poursuit ses économies. Résultat : le financement de l'Etat retomberait à 74,4 M€, d'après le PLF 2013.


En novembre 2012, le sénateur Philippe Adnot a déposé un amendement rétablissant une subvention de 4,9 M€ provenant de la mission Travail et Emploi. Rejeté à l'Assemblée nationale, le texte a été accepté par la commission des finances du Sénat, et pourrait être adopté lors du vote définitif du PLF. 


Cependant, même dans ce cas, pour les écoles associatives privées, le compte n'y est pas. "Nous obtiendrions 79,3 M€, un montant qui reste inférieur à celui de 2010. Et ce, alors même que les effectifs ont augmenté, passant de 58.000 à 74.000 en trois ans !", proteste Nesim Fintz, directeur de l'EISTI et président de l'UGEI (Union des grandes écoles indépendantes). "C'est une chute absolue de nos subventions !"

Une relativisation nécessaire pour la rue Descartes


Rapporté au nombre d'élèves, le financement public a diminué d'environ 30 % en trois ans, de 1.322 € à 1.005 €, ou à 1.070 € si l'amendement Adnot est voté. "Pour l'Etat, nos écoles, à but non lucratif, représentent un coût dix fois moins élevé que celui des écoles publiques, subventionnées à hauteur de 10 ou 12.000 € par étudiant", fait valoir Jean-Michel Nicolle, directeur de l'EPF et représentant des écoles privées à la CDEFI (Conférence des directeurs d'écoles françaises d'ingénieurs). "Nous avons bien conscience d'être dans une période délicate en termes d'équilibre financier, poursuit-il. C'est pourquoi nous demandons seulement de maintenir les ressources passées : 12,5 M€ permettraient de revenir à la situation de 2010. Une somme dérisoire par rapport au budget de l'Etat."


Mais dans "une année de redressement budgétaire", il ne paraît pas anormal, rue Descartes, de demander "un léger effort" aux écoles associatives privées, d'autant que, rappelle-t-on, ces subventions sont totalement facultatives. En outre, Matignon a demandé de réduire toutes les dépenses non prévues par la loi de 7 %. Or la baisse n'est que de 5 % pour les écoles privées, sur des montants qui représentent en moyenne 7 % du budget des écoles d'ingénieurs et de commerce, exception faite des instituts confessionnels où les subventions atteignent 22 % du budget. D'où un appel du ministère à relativiser la réduction de l'enveloppe.

Investissements liés à la contractualisation


De leur côté, les écoles associatives privées mettent en avant les investissements réalisés depuis la contractualisation avec l'Etat, notamment en matière d'ouverture sociale et de recherche.

"Nous avons mis en place une dynamique de progrès que nous n'avons pas l'intention d'abandonner", affirme le directeur de l'EPF qui explique avoir recruté sept enseignants-chercheurs en un an, un directeur pour le campus de son école à Troyes et un autre à Montpellier. "Nous avons investi dans la qualité des personnes, augmenté le taux d'encadrement, commencé à construire une recherche qui a du sens", énumère-t-il en parlant d'un "effet cliquet : nous ne pouvons pas revenir en arrière. Il faut absolument trouver des ressources de substitution".

Nous ne sommes pas des écoles pour gosses de riches !
(Florence Darmon, présidente de la commission diversité de la CGE)


A ce sujet, Geneviève Fioraso avait déclaré à l'Assemblée nationale, le 9 novembre 2012, que les écoles associatives privées "peuvent jouer sur les frais d’inscription qui représentent la majeure partie de leur financement".

"C'est une aberration ! Nous ne sommes pas des écoles pour gosses de riches !", s'indigne Florence Darmon, directrice de l'ESTP et présidente de la commission diversité de la CGE (Conférence des grandes écoles). "Il n'est pas question de prélever davantage les familles !, confirme Jean-Michel Nicolle. C'est à l'Etat d'assumer ses responsabilités !" Un effort qui pourrait être, selon lui, temporaire dans la mesure où les écoles associatives privées espèrent atteindre l'autofinancement. "Nous avons un problème d'investissement en matière de recherche. Le soutien de l'Etat nous permettrait de développer d'autres activités", explique le représentant des écoles d'ingénieurs privées.

Manque de (re)connaissance


Plus largement, nombre de directeurs se disent déçus, à l'instar de Florence Darmon : "nous avons des formations de qualité, de très bons taux d'insertion professionnelle, et l'on ne récompense pas notre efficacité". D'où "l'impression que des décisions arbitraires sont prises par méconnaissance", lâche la directrice de l'ESTP.

Nous souffrons de discrimination institutionnelle
(Jean-Philippe Ammeux, président de la FESIC)


"L'Etat ne tient pas ses engagements", estime aussi Jean-Philippe Ammeux. Le directeur de l'IESEG et président de la FESIC rappelle que les contrats signés avec les établissements associatifs privés fixent des objectifs et que ceux-ci sont évaluées par l'AERES (Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur). Et d'évoquer une "discrimination institutionnelle : nous n'avons pas bénéficié de la hausse du budget de l'enseignement supérieur et de la recherche entre 2007 et 2012, et au moment de faire des économies, nous sommes les premiers sacrifiés !"

Autant de sujets qui, au-delà du PLF 2013, devraient faire continuer à faire l'objet de discussions avec le ministère : sur 57 contrats signés avec l'Etat, 36 arrivent à échéance fin 2012.

Méfiance sur l'importance accordée aux politiques de site

Geneviève Fioraso a rappelé, lors des Assises nationales de l'enseignement supérieur et de la recherche, sa volonté de voir émerger des stratégies de site, en faisant, notamment, évoluer les PRES vers de grands établissements universitaires.

Evoquant les a priori qui entravent parfois les collaborations entre écoles privées et universités, le président de l'UGEI Nesim Fintz craint que les premières ne soient mises à l'écart. Et de rappeler que, si son école, l'EISTI, est membre fondateur du Collegium Ile-de-France, la plupart des établissements privés sont "au mieux membres associés, ce qui ne laisse pas les coudées aussi franches que pour les fondateurs. Et certaines de nos écoles n'ont même pas eu ce strapontin..."

L'enseignement supérieur privé associatif en bref

 L'enseignement supérieur privé associatif compte 74 000 étudiants dans environ 60 écoles, rassemblées principalement au sein de quatre associations :

- la FESIC, réseau de 28 grandes écoles d'ingénieurs et de management.

- l'UGEI (Union des grandes écoles indépendantes) composée de 17 écoles d'ingénieurs et 8 écoles de commerce et de management

- l'UDESCA (Union des établissements d'enseignement supérieur catholique) qui regroupe les cinq universités catholiques de France (Angers, Lille, Lyon, Paris, Toulouse)

- l'UNFL (Union des nouvelles facultés libres) qui réunit la FACO (Faculté libre de droit, d'économie et de gestion), l'Institut Saint-Jean Paris/CEPHI, l'Ircom, I2M Caraïbes (Institut de management et de marketing supérieur de commerce des Caraïbes), l'IPC (facultés libres de philosophie et de psychologie), l'Ices (Institut catholique d'études supérieures) et l'ICR (Institut catholique de Rennes).

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