Comment former de plus en plus d'étudiants, tout en optimisant les coûts et en les faisant réussir ? Comment faire de l'enseignement personnalisé à grande échelle ? Ce sont là les questions auxquelles l'adaptive learning veut apporter une solution.
Ce terme désigne à la fois une philosophie (l'idée que l'enseignement, pour être efficace, doit être le plus personnalisé possible) et un ensemble d'outils, utilisant les big datas, l'intelligence artificielle, le "machine learning", les neurosciences et la psychologie cognitive.
De quoi s'agit-il ? De cours, exercices ou évaluations à faire en ligne (à la maison, en classe, en entreprise) s'adaptant à un individu en temps réel, selon son rythme d'apprentissage, ses difficultés, ses facilités et ses préférences. Ainsi, pour arriver à un même point, chaque étudiant prendra un chemin différent.
L'objectif ? Amener chacun à progresser, quelle que soit sa forme d'intelligence ou son niveau de départ, d'éviter les frustrations ou les abandons en cours de route, de créer chez les étudiants davantage de plaisir et d'envie d'apprendre. Dans cet univers, l'enseignant a un rôle de coach, de guide... voire disparaît.
Une méthode encore en gestation
De plus en plus d'universités américaines achètent ces logiciels et plateformes pour un coût estimé entre 100 et 200 dollars par cours, par étudiant et par semestre. Une poignée de start-ups se sont positionnées sur ce créneau, comme Knewton, LoudCloud, ou Smart Sparrow, qui vendent leurs solutions à des universités ou collaborent avec des éditeurs de contenus, en particulier Pearsons et McGraw-Hill. La fondation Bill and Melinda Gates, ainsi que l'université Carnegie Mellon sont également des acteurs importants de ce mouvement, l'un finançant plusieurs initiatives comme dix bourses de 100.000 dollars pour accélérer la mise en place de l'adpative learning dans l'enseignement supérieur, et l'autre menant des activités de recherches sur ces thèmes.
Mais tout cela "reste encore une niche", concède Brian Fleming, consultant chez EduVentures, cabinet spécialisé dans l'enseignement supérieur. Il estime qu'"environ 5%" des universités américaines disposent de ce type d'outils, et cite en exemple l'American Continental University, Arizona State University ou encore l'université du Texas. "Pour le moment, elles les utilisent pour un cours ou un autre, mais peu se sont encore engagées dans un cursus complet et multidisciplinaire utilisant systématiquement ces outils." "L'adaptive learning est encore le secret le mieux gardé dans l'enseignement supérieur", reconnaît le rapport du cabinet Tyton Partners sur ce sujet.
L'adaptive learning est encore le secret le mieux gardé dans l'enseignement supérieur.
(Tyton Partners)
Des premiers résultats positifs
Même si les études sont encore peu nombreuses, les résultats de ces nouvelles méthodes s'avèrent positifs. Arizona State University, pionnière dans ce domaine et qui utilise les logiciels de Knewton dans ses cours de maths, a vu le nombre de ses étudiants ayant validé un module augmenter de 18%, tandis que le taux d'abandon en cours de route a baissé de 47%, selon le rapport de Tyton Partners.
Une autre étude conduite dans six universités publiques a montré les étudiants qui suivaient un cours de statistiques en adaptive learning arrivaient aux mêmes résultats que les autres étudiants dans un temps inférieur de 25% (les autres suivaient le même cours avec un enseignant en face à face). Et ce, quelles que soient les origines sociales des élèves.
bousculer les modèles pédagogiques
Toutes "mettent en évidence le potentiel que l'adaptive learning peut avoir sur les trois paramètres clés avec lesquels doivent jongler les universités, à savoir le coût, la qualité, et l'accessibilité", affirme le rapport du cabinet Tyton Partners. Un rapport qui insiste néanmoins sur les difficultés inhérentes à la mise en place de ce type d'outils, qui bousculent les modèles pédagogiques et nécessitent de repenser les cursus et les rôles des enseignants. Sans parler du coût de ces logiciels. De plus, il n'existe encore aucun standard ou système de contrôle qualité dans ce domaine.
Autre limite : si les start-ups qui fournissent ces logiciels affirment que leurs solutions marchent dans toutes les disciplines, "elles restent surtout efficace pour les cours de remédiation, tutorat, remise à niveau en maths ou en sciences", remarque Brian Fleming. Des disciplines plus adaptées aux quizz, exercices et tests en ligne.
Enfin, l'utilisation de ces logiciels pose de nombreuses questions quant à l'utilisation des données récoltées sur les comportements des étudiants – et leur potentielle utilisation ou piratage pour des buts commerciaux.
- Knewton : le big data au service de l'éducation (Blog d'Antione Amiel - novembre 2013)
- Le rapport "Learning to adapt" du cabinet Tyton Parners
- Education: Hachette Livre se met à l' "adaptive learning" (Vousnousils)
La start-up Knewton a fait partie des visites de la Learning expedition EducPros en avril 2015. La prochaine Learning expedition EducPros s'arrêtera à San Francisco et dans la Silicon Valley, du 1er au 6 novembre 2015. La délégation visitera également Stanford, Berkeley, Autodesk, Techshop, Coursera...
Véritable plongée au cœur de l'innovation et de l'écosystème de la côte Ouest, ce voyage d'études est l'occasion pour les participants de nouer de nouveaux partenariats et de faire émerger de nombreux projets.
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