Face à une concurrence mondiale devenue intense, le mariage est devenu monnaie courante dans le milieu des écoles de management hexagonales. Alors que, ces dernières années, Neoma ou Kedge ont choisi la fusion pour atteindre la fameuse "taille critique", l'EM Lyon et GEM choisissent – pour l'instant – la voie du partenariat stratégique.
Les voisines rhônalpines ont officialisé, mardi 29 mars 2016, leurs fiançailles et la création de "l'Alliance EM Lyon business school et Grenoble École de management", un partenariat renforcé, validé le 25 mars 2016 par leurs organes de tutelle – CCI de Grenoble d'un côté, CCI Lyon-Métropole et l'AESCRA (Association pour l'enseignement supérieur du commerce en Rhône-Alpes) de l'autre.
"produire pour davantage d'étudiants"
Une alliance guidée par une logique territoriale, jugée indispensable à l'heure où les écoles, menacées par la baisse de leurs ressources et l'ubérisation, doivent trouver de nouveaux modèles pour survivre.
"Demain, si la puissance de la donnée (Google), s'allie avec celle de la certification (l'université de Stanford) on est morts ! ll n'y a pas de futur pour les gens qui restent à ce niveau d'activité. Il faut produire pour davantage d'étudiants", assure le patron de l'école lyonnaise, Bernard Belletante. L'homme a déjà piloté le rapprochement de BEM (Bordeaux management school) et Euromed au sein de Kedge.
"Nos deux écoles vont bien, elles n'ont jamais été aussi fortes, mais, pour continuer à se développer et à investir, elles ont besoin de davantage de moyens", ajoute son homologue grenoblois, Loïck Roche.
L'Alliance pèse déjà plus de 9.000 étudiants et un budget opérationnel consolidé de 120 millions d'euros. Des chiffres qui la "placent au niveau d'HEC", se félicite Bernard Belletante, dont l'ambition est d'atteindre "180 millions d'euros" de budget.
Pour l'instant, pas de contrat de mariage, ni de gouvernance, ni même de budgets communs, "mais une structure ad hoc, sans statut juridique, copilotée par les deux écoles", et permettant la mise en commun de moyens et la création de valeurs dans leurs domaines de prédilection : "l'innovation", chère à GEM, "l'entrepreneuriat", inscrite dans l'ADN de l'EM Lyon, et par, extension, "la croissance" et "les nouveaux business".
une stratégie commune de recherche
Dès la rentrée 2016, les fiancées mutualiseront les expertises de leurs corps professoraux au service d'une stratégie commune de recherche. Un moyen efficace d'élargir leur champ de compétences, en croisant leurs savoir-faire et, bien entendu, d'accroître leur production en matière de recherche.
Un élément clé pour grimper dans les différents classements et décrocher les accréditations internationales. "À elles deux, les écoles représentent 200 professeurs permanents" et un potentiel de publication "d'une centaine d'articles par an, dont une moitié dans les catégories 1*, 1 et 2", assure Bernard Belletante.
Objectif : "atteindre 250 professeurs et 140 publications, dont 80 de rang 1 et 2 et donc de devenir le premier centre de recherche français en sciences de gestion." L'alliance va également se concrétiser par la réunion des programmes doctoraux, PhD à l'EM Lyon et DBA (Doctorate of business administration) à GEM.
Sur le plan économique, cette Alliance offre aux écoles la force de frappe pour s'adresser aux grandes entreprises, et aux ETI (entreprises de taille intermédiaire) de la région Auvergne-Rhône-Alpes, deuxième région française et septième région au niveau européen en termes de PIB.
"Nous allons pouvoir répondre à des appels d'offres en commun", précise Loïck Roche. Très rapidement, l'objectif est de créer une fondation "innovation-entrepreneuriat". Cette mise en commun va également concerner les programmes de R & D et l'ingénierie pédagogique.
"ON NE S'INTERDIT RIEN"
À partir de septembre 2017, les deux partenaires iront plus loin. Au programme : des recrutements coordonnés de chercheurs à l'international, un réaménagement et une harmonisation des portefeuilles de programmes, avec une offre commune en matière de formation continue.
Et pour mieux concrétiser cet objectif, les deux écoles réfléchissent à faire campus commun dans la capitale. Tandis que l'EM Lyon s'apprête à inaugurer son nouveau site près de la gare de Lyon, les locaux que GEM partage Rue du Ranelagh (16e) avec l'EM Normandie sont devenus trop petits.
Elles envisagent également des synergies en matière d'implantations à l'étranger, qu'il s'agisse de Shanghai ou de Casablanca, où l'EM Lyon possède des campus.
Et après ? Si rien n'est décidé, les deux écoles ne "s'interdisent rien", y compris la fusion.