"Ne pas exclure les gens à potentiel" : tel est le leitmotiv de la CinéFabrique, selon Valérie Schmidt, coordinatrice pédagogique. L'école publique de cinéma a ouvert ses portes en septembre 2015, à Lyon.
Trente élèves ont été sélectionnés pour la première promotion. Sans que l'école n'ait lancé de communication, quelque 400 candidats se sont présentés. Et "nous avons des appels tous les jours", note Valérie Schmidt. Seul le niveau bac est demandé, aucun dossier scolaire ou prérequis technique ou scientifique n'est requis.
Repérer des personnalités
Un contraste avec les étudiants de la Fémis, la plus prestigieuse école de cinéma française, qui "passent souvent par une licence de cinéma et sont issus de formations d'excellence", relève Valérie Schmidt.
La CinéFabrique cherche plutôt des "personnalités et des comportements" avec sa procédure de recrutement alternative, analyse Mehdi Ait-Kacimi, directeur du développement de l'école Louis-Lumière. Pas de traditionnelle étape de contrôle de connaissances afin d'éviter la "discrimination par l'écrit", défend Valérie Schmidt.
Pour entrer à l'école lyonnaise, les candidats doivent présenter une production personnelle : un petit film, un livre, un site, un disque... Et un autoportrait en vidéo de trois minutes. Les sélectionnés participent ensuite à une journée de pratique avec des professionnels : des ateliers le matin, et l'amorce de création de films en groupe pour tester leur esprit d'équipe l'après-midi. Enfin, ils passent un oral devant un jury.
De prestigieux parrains
Une fois intégrés, les étudiants peuvent choisir parmi cinq filières : image, scénario, son, montage ou production. Un prestigieux parrain s'est penché sur le berceau de la CinéFabrique : Abderrahmane Sissoko, réalisateur de "Timbuktu", préside l'établissement et les frères Dardenne ont prévu d'y donner des cours.
L'école dispose d'un budget de 2 millions d'euros, provenant aux deux tiers de fonds publics et à un tiers de fonds privés : la région Rhône-Alpes, le Centre national du Cinéma, la banque OBC, la Fondation de France et l'Afdas.
L'esprit "42" appliqué au cinéma
Le principe de la CinéFabrique n'est pas sans rappeler la philosophie de l'École "42", fondée par Xavier Niel en mars 2013. Il s'agit d'apprendre en essayant, loin des enseignements théoriques. Et de révéler des élèves peu scolaires.
Après trois ans de formation, dont une en alternance, les étudiants recevront une licence professionnelle délivrée par l'université Lyon 2, partenaire de l'école. Pour accompagner son lancement, la profession a aussi créé un groupement d'entreprises pour accueillir les élèves en alternance. Mais, surtout, permettre aux jeunes sans réseau dans le cinéma de réussir. Car "il faut changer le vivier du cinéma, estime Valérie Schmidt. À force d'unifier les procédures de recrutement, nous n'aurons que des gens formatés selon un schéma précis."
Pour repérer encore d'autres profils, la CinéFabrique a mis en place, en parallèle de la promotion de cinéma, une prépa égalité des chances. Cette "classe d'orientation" accueille huit jeunes recrutés sur critères sociaux, dont trois n'ont pas le bac. Les élèves recrutés ont entre 17 ans et demi et 23 ans, un BEP élevage canin ou une licence en philosophie en poche... "Ils sont en grande difficulté ou pas scolaires du tout. C'est une classe d'ouverture, pour aborder le théâtre, la peinture et des filières n'ayant rien à voir avec l'art", explique Valérie Schmidt. Un cursus qui prépare à l'entrée à la CinéFabrique et aux autres écoles d'art.