Transformer la pédagogie est l’une des clés de la réussite étudiante, souligne le rapport sur la pédagogie dans l’enseignement supérieur, soumis au Cneser (Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche) le 15 septembre 2014. La secrétaire d'Etat, Geneviève Fioraso, a prononcé un discours à cette occasion.
Commandé par la DGESIP (direction générale pour l’enseignement supérieur et l’insertion professionnelle) à Claude Bertrand (Ministère - Mission numérique pour l'enseignement supérieur), ce document prône de nouvelles pratiques d’enseignement et d’apprentissage.
"La pédagogie est maintenant un sujet à part entière dans la politique universitaire, une question dans l’air du temps, dont tous les acteurs s’emparent, le ministère en particulier", assure l’auteur, qui décline les freins à la transformation dans ce domaine.
Une prime d'excellence pédagogique ?
Parmi eux : le manque de reconnaissance de l’activité d’enseignement est un obstacle "majeur", qu’il s’agisse de la carrière des enseignants-chercheurs, de leur recrutement, ou encore de la prise en compte de cette activité dans les services. "L’enjeu est de professionnaliser cette activité afin de mieux la reconnaître et plus largement de contribuer au rééquilibrage des missions Formation et Recherche des établissements", préconise le rapport.
Sur le fond, l’auteur s’interroge notamment sur la place du cours magistral, qui devrait céder à des approches de type pédagogie inversée, notamment dans le premier cycle. "Les enseignants doivent apprendre à travailler au sein d’équipes pédagogiques et dépasser la culture d’autonomie de l’enseignant seul responsable de ce qu’il enseigne", estime-t-il.
"La valorisation de l'implication des enseignants dans la formation peut prendre la forme de prime", envisage-t-il, avec une "prime Excellence pédagogique (PEP), inspirée de la PES (Prime d'excellence scientifique)" par exemple. Un référentiel de compétences, sur le modèle de ce qui existe dans l'enseignement scolaire ou à l'international, serait également pertinent, préconise le rapport.
On nous présente la pédagogie comme si celle-ci n’existait pas à l’université, en faisant passer les enseignants-chercheurs pour des 'has been'.
LEs réactions de l'uNef et du Snesup
Pour l’Unef, ce rapport et le discours de la secrétaire d’Etat devant le Cneser montrent une bonne intention. "Cela faisait longtemps que le ministère ne parlait plus de réussite étudiante et de pédagogie, s'intéressant principalement aux regroupements et Comue, souligne William Martinet, président du syndicat étudiant. Enfin, ce sujet revient à l’ordre du jour ! Avec des mesures intéressantes comme le Grenelle de la pédagogie ou bien la nécessité de faire de la pédagogie un axe central de la contractualisation entre les universités et l’Etat. Il ne manque plus que la feuille de route."
Côté enseignants, la réaction est bien plus critique. "On nous présente la pédagogie comme si celle-ci n’existait pas à l’université, en faisant passer les enseignants-chercheurs pour des 'has been'. Cela fait des années que la pédagogie est présente dans nos formations !, s'énerve Pierre Chantelot, responsable du secteur Formation au Snesup. Il y a tout de même quelques propositions qui vont dans le bon sens, comme l’harmonisation de l’évaluation des enseignants-chercheurs au CNU (Conseil national des universités), ou le cadrage national pour le référentiel des tâches des enseignants-chercheurs, mais de manière globale ce rapport ne tient pas la route, même sur sa méthodologie. Et surtout, il n'y a pas de moyens derrière."
Des appels à projets, étant donné les moyens limités
Le rapport reconnait que "les moyens financiers et humains constituent sans doute un signal et un levier important, s’ils sont mis au service de véritables projets de transformation pédagogique", tout en remarquant que la période est "peu propice" à des dotations conséquentes.
"Il est donc important de cibler ces dotations sur des projets précis", recommande le rapport, citant la prise en compte de cet investissement pédagogique dans le futur modèle d’attribution des moyens aux universités [réforme du système Sympa en cours, NDLR], mais surtout le lancement d’appels à projets d’innovation pédagogique, comme les Idefi.
Et d'insister : "il importe aussi de faire percevoir aux équipes de gouvernance que la mise en place d’autres modes de formation n’est pas nécessairement synonyme d’une augmentation globale des budgets."
Le Cneser s'est exprimé le 15 septembre 2014 sur les statuts de la Comue normande. Résultat : les élus ont, une nouvelle fois concernant ce type de regroupements, émis un vote négatif.
- Le rapport : Soutenir la transformation pédagogique dans l'enseignement supérieur (pdf)
- La déclaration du Snesup au Cneser (pdf)
- Le billet de Pierre Dubois (Histoires d'universités) : Pédagogie, le rapport scandaleux