La réforme de l’apprentissage était considérée comme celle de tous les dangers pour les grandes écoles, et dans une moindre mesure pour les universités. Le projet de loi de finances rectificative avait déjà suscité des levées de boucliers, en confiant aux régions une part substantielle (55%) de la gestion de la taxe.
Baisse du barème
On connaît maintenant le sort réservé au "hors quota" ou barème, qui représente en moyenne 6% du budget des grandes écoles, amputé à nouveau de 50 millions d’euros en 2015.
De plus, une nouvelle forme "d’amputation" vient s’y ajouter : si le barème concerne toujours les formations professionnelles "hors apprentissage", l'avant-projet de loi précise qu’il pourra également "venir abonder les concours financiers obligatoires des employeurs au titre de la formation de leurs propres apprentis", au cas où la part "quota" de la taxe s’avèrera insuffisante.
Une disposition qui fait réagir vivement Philippe Jamet, le président de la CGE (Conférence des grandes écoles) : "cela revient à donner une caisse de secours aux entreprises dans laquelle elles pourront puiser, qui peut donner lieu à toutes les dérives, s’insurge-t-il. C’est vraiment un mauvais coup !"
Côté universités, vigilantes sur la préservation du barème, cette disposition n’est pas nouvelle : "en tant qu’universités, nous travaillons avec les CFA, explique Gilles Roussel, responsable de la commission formation de la CPU (Conférence des présidents d'université). Dans les faits, il arrive qu’une partie du hors quota soit déjà utilisé pour soutenir l’apprentissage".
Autre élément dont les contours sont cependant encore peu précis : la sélection des bénéficiaires du barème fera désormais l’objet "d’une concertation avec les Régions et les partenaires sociaux", sur des critères stricts : reconnaissance par l’Etat, contrôle pédagogique et absence de lucrativité. "Nous estimons que le toilettage de cette collecte était nécessaire, reste à connaître ce que l’on met derrière le terme de 'lucrativité'."
Les modalités concrètes devraient être bientôt connues, car précisées dans le volet "gouvernance" du projet de loi portant réforme de la formation professionnelle, en cours de négociation et prévu avant la fin du mois de décembre 2013.
Réduction du nombre d'OCTA
Enfin, la collecte de la taxe va être modifiée en profondeur : le nombre d’organismes collecteurs, de 147 aujourd’hui, sera fortement réduit, à un par région et 20 au niveau national. Si les OCTA régionaux seront gérés par les chambres consulaires, au niveau national, ils devraient être adossés à des OPCA (organismes paritaires collecteurs agréés), récoltant les fonds de la formation professionnelle. Un "mélange des genres", estime Philippe Jamet, "qui sera préjudiciable à la spécificité de l’apprentissage, en l’associant aux contrats de professionnalisation et à la formation professionnelle, qui ne relèvent pas des mêmes acteurs ni de la même démarche pédagogique".
Pour la CPU, si les circuits de financement dédiés à chaque mode de formation doivent être transparents, cette simplification est bienvenue et une "sanctuarisation de l’apprentissage" n’a pas lieu d’être : "l’apprentissage, de même que la formation professionnelle et les contrats de professionnalisation, va dans le sens de la formation tout au long de la vie en mixant plusieurs modalités d’apprentissage, estime Gilles Roussel. Nous sommes favorables à ce que les barrières soient moins rigides".