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Saclay : Emmanuel Macron acte la séparation en deux pôles distincts

Céline Authemayou, Laura Taillandier Publié le
Saclay : Emmanuel Macron acte la séparation en deux pôles distincts
Emmanuel Macron expose sa vision de Paris-Saclay, mercredi 25 octobre 2017. // ©  Denis Allard / R.E.A
Saclay voit double. En déplacement sur le plateau, mercredi 25 octobre 2017, le président de la République a officialisé la fin du projet unique. Il y aura désormais d'un côté l'Université Paris-Saclay et de l'autre une alliance de grandes écoles autour de l'École polytechnique.

Une Université Paris-Saclay à 19 membres c'est terminé. Le plateau devra désormais compter sur deux entités bien distinctes. "Je veux graver avec vous dans le marbre la voie choisie par les acteurs : que l'ensemble universitaire de Paris-Saclay se compose de deux pôles complémentaires et d'éléments de transversalité profondément structurés", acte Emmanuel Macron, en déplacement à Gif-sur-Yvette

D'un côté, "une université de recherche intensive intégrée" réunissant les universités Paris-Sud, UVSQ et Évry conservera la marque "Paris-Saclay". CentraleSupélec, l’ENS Paris-Saclay et l’IOGS s’ajouteront à ce cercle, qui partira le 18 décembre 2017 à la conquête définitive de l’Idex. Un pôle qui pourra bénéficier des outils législatifs en préparation permettant "à ces entités fortes de conserver leur personnalité morale tout en s'intégrant pleinement dans une maison commune". De l'autre, "une alliance de grandes écoles" construit autour de l'École polytechnique, baptisé pour le moment NewUni, regroupera a minima l'ENSTA ParisTech, l'ENSAE ParisTech, Télécom ParisTech et Télécom SudParis. Elle délivrera "tous les niveaux de diplômes, mutualisant ses forces et devra trouver des voies originales pour évoluer vers un MIT à la française", souligne le président de la République.

"Le temps des atermoiements est terminé"

"Nous le savons les constructions institutionnelles sont parfois peu lisibles par la société civile et les partenaires internationaux. Nous devons construire un paysage plus simple, plus clair, plus efficace, plus attractif encore pour les chercheurs et qui offre plus d'opportunités encore pour les étudiants", expose Emmanuel Macron. Le président défend ce nouveau projet auquel il "croit profondément" et qui correspond "aux attentes des acteurs". "Le temps des atermoiements est terminé", une "nouvelle phase s'ouvre", argumente le chef de l'État, revenant sur les différents épisodes qui ont rythmé l'histoire de Saclay.

"Quand il fut demandé à ces institutions aussi légitimement fières de leur parcours de s'unir sous un pavillon commun, un nerf sensible fut atteint. Les questions de prééminence se sont sans doute posées", relève Emmanuel Macron. "Les véritables compétiteurs du plateau sont à Lausanne, à Boston, à Singapour... À chaque fois que nous perdons de vue les véritables conquêtes et que nous mettons trop d'énergie dans des guerres intestines nous ralentissons un peu l'histoire", regrette-t-il. "Certaines institutions ont joué le jeu, d'autres ont marqué leurs réticences et pendant un temps certains de mes successeurs ont craint que ce projet ne s'écrase." Mais, aujourd'hui, "une nouvelle phase s'ouvre" pour le président.

À chaque fois que nous perdons de vue les véritables conquêtes et que nous mettons trop d'énergie dans des guerres intestines nous ralentissons un peu l'histoire.
(Emmanuel Macron)

Quelle coordination entre les deux pôles ?

"Nous ne sommes pas sur un scénario universités d'un côté et écoles de l'autre" qui "serait extrêmement insatisfaisant", assure l'Élysée en amont du déplacement du président. Et d'avancer ses arguments : l'Université Paris-Saclay compte des facs mais aussi des écoles. "Si les écoles avaient voulu bloquer nous n'en serions pas là aujourd'hui. Une part de la naïveté était de considérer que les rapprochements pouvaient se faire sans que la gouvernance des universités ait évolué."

La question se pose désormais de la coordination entre ces deux grands pôles. Pour Emmanuel Macron, ce sont les organismes de recherche comme le CEA, le CNRS ou l'Inserm qui seront "le ciment en terme de recherche". "Ils assureront encore à travers leurs projets et leurs équipes la solidarité organique du plateau et aussi le lien avec la communauté scientifique nationale", juge le chef de l'État. "La distinction des deux pôles n'empêche nullement qu'ils soient liés par un tissu conjonctif de projets de recherche ou pédagogiques communs."

Parmi les premières craintes exprimées par les enseignants-chercheurs, pointe pourtant l’avenir incertain des masters co-habilités avec l’actuelle Université Paris-Saclay. "Nos écoles, qui seront dans le pôle de l’X, pourront-elles continuer à porter ces diplômes ? Les enseignants se sont énormément investis dans ces programmes", souligne un élu CFDT de Télécom ParisTech. La question se pose également sur les doctorats et sur toutes les mutualisations opérées au cours de ces dernières années.

Paris-Saclay,à l'avant-garde de la réforme du premier cycle ?

Emmanuel Macron ne s'arrête pas là. Il "souhaite aussi qu'à Saclay soit pris à bras le corps l'ensemble des enjeux du premier cycle" pour qu'il ne soit pas "le parent pauvre de ces ambitions nouvelles". "Il conviendra à ce sujet de se fixer des objectifs d'excellence, en même temps que d'ouverture sociale et de diversification des cursus", détaille le président qui vante le travail mené dans le projet de l'Université Paris-Saclay qui "a même su anticiper les réformes que la ministre va présenter" le 30 octobre.

Car l'Université Paris-Saclay devrait elle aussi s'organiser autour de deux ensembles : "une université de recherche intensive de rang mondial pour attirer les étudiants nationaux et internationaux" et une école universitaire du premier cycle, détaille Sylvie Retailleau, la présidente de Paris-Sud.

Dans le premier ensemble, l'idée est de proposer des licences sélectives aux étudiants "qui ont de bonnes bases". Le mode de sélection qui sera différent de celui des classes prépas est en discussion. Le second ensemble surfera sur "l'exemple de la réussite des IUT". "Ce n'est pas une école poubelle. C'est là que nous allons mettre financièrement le paquet !", se défend la présidente qui souhaite mettre l'accent sur des formations à bac+3, de l'accompagnement et des innovations pédagogiques. "Il y a aura des passerelles entre ces deux ensembles et notamment des services communs sur l'orientation professionnelle", assure Sylvie Retailleau.  

L'ouverture de cette école universitaire devra attendre la création officielle de l'Université Paris-Saclay dans le courant de l'année scolaire 2019-2020. Il faudra aussi patienter quelques années de plus – 2025 au plus tard – pour que l'intégration de l'UVSQ et d'Évry soit effective. Entre temps, les deux universités "feront partie de la gouvernance mais conserveront leurs personnalités morales et juridiques"

De leur côté, les écoles rassemblées autour de Polytechnique et du projet NewUni n'ont pas encore arrêté de calendrier définitif. Mais elles devront elles aussi prendre leur "part d'initiatives" en terme d'ouverture sociale et de transformations du premier cycle. Loin d'être fini, le feuilleton Paris-Saclay ouvre un nouveau chapitre.

Céline Authemayou, Laura Taillandier | Publié le