C'est à Nepal Hill, à l'ouest de Singapour, que l'Essec a inauguré lundi 4 mai 2015 son campus Asie-Pacifique. Dix ans exactement après le début de son implantation dans la cité-État, la business school française passe à la vitesse supérieure. Avec ce campus d'une superficie de 6.500 m2 pouvant accueillir plus de 1.000 étudiants, dont la construction a coûté près de 24 millions d'euros, la business school de Cergy-Pontoise affiche clairement son ancrage asiatique. Et ce n'est pas un hasard si l'école française s'est installée dans ce quartier qui regroupe les pôles Fusionopolis, dédié aux technologies de l'information, Biopolis, consacré aux biotechnologies, et LuchPad, qui regroupe des start-up. "Nous sommes au cœur de l'innovation à Singapour", explique Kevin Yong, le directeur des études à l'Essec. Le nouveau campus se trouve tout près du centre de formation du géant des biens de consommation Unilever ouvert en 2013, et à quelques encablures de l'Insead, présente à Singapour depuis 15 ans et qui vient d'inaugurer également un nouveau centre dédié à l'innovation.
une volonté d'attirer les meilleurs établissements
Aujourd'hui, Singapour compte pas moins de onze campus d'écoles et universités internationales de premier rang et des échanges avec plus de 100 universités étrangères parmi lesquelles MIT, Warwick, Duke, HEC ou encore Polytechnique. Pour les établissements étrangers, Singapour offre de nombreux atouts : une ville en plein cœur de l'Asie, devenue un passage obligé dans toute stratégie d'internationalisation, et dotée d'excellentes infrastructures.
Quant à la cité-État, dépourvue de ressources naturelles, attirer et former les meilleurs talents a toujours été une nécessité. En 2002, Singapour lance le projet Global School House. Un programme ambitieux qui prévoit d'attirer 150.000 étudiants d'ici à 2015 et de faire passer la contribution du secteur de l'éducation de 1,9 à 5% du PIB. "C'est dans le cadre de ce projet que nous avons été approchés par le gouvernement singapourien, explique Martine Bronner, doyenne du campus Essec Asia-Pacific. Le bâtiment a été intégralement financé par l'Essec mais les autorités nous ont aidés à trouver l'emplacement et nous bénéficions de subventions pour développer de nouveaux programmes." Singapour compte aujourd'hui environ 75.000 étudiants étrangers.
Une stratégie qui fait mouche : d'ici fin mai, c'est au tour de l'université américaine Yale d'inaugurer son campus spécialisé dans les arts libéraux.
Des universités singapouriennes au top niveau
Mais si être un hub consiste à attirer des universités étrangères, Singapour a également investi pour ses propres universités. 26% du budget de l'éducation est consacré aux universités publiques mettant en avant le concept d'"universités de classe mondiale". Au total, Singapour compte six universités publiques : National University of Singapore, Nanyang Technology University, Singapore Management University, Singapore University of Technology and Design, Singapore Institute of Technology and SIM University.
En quelques décennies, ces universités se sont imposées dans les classements universitaires. Selon le Times Higher Education, NUS figurait en 25e position, gagnant une place par rapport à l'année dernière. Toujours selon le Times, NTU est l'étoile montante de l'éducation, passant de la 108e à la 61e place du classement en quelques années seulement. "Les financements publics vont vers ces grandes universités car leur réussite est une condition nécessaire pour la réussite économique du pays", explique Alessia Lefébure, directrice du programme Alliance à l'université de Colombia et spécialiste de l'enseignement supérieur en Asie. Signe de leurs ambitions, certaines universités regardent déjà hors de leurs frontières. C'est le cas notamment de NTU, qui compte ouvrir un campus à Londres. Preuve que le hub fonctionne dans les deux sens...
Si Singapour fait figure d'eldorado asiatique de l'enseignement, les défis ne manquent pas. Suite aux élections législatives de 2011 et la grogne des Singapouriens envers les étrangers, les objectifs d'attraction des étudiants étrangers ont été revus à la baisse. En 2011, il y avait 18% d'étudiants étrangers à Singapour et le ministre de l'Éducation s'était engagé à réduire ce chiffre à 15%.
Cette tension envers les étrangers se fait également ressentir sur le marché de l'emploi. Face au mécontentement des Singapouriens, le gouvernement a resserré les conditions pour l'embauche d'étrangers. "C'est un peu plus difficile qu'avant, reconnaît Martine Bronner. Mais nous devons précisément être capables de former et d'offrir des profils recherchés", affirme, confiante, la directrice du nouveau campus de l'Essec à Singapour.