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Un étudiant sur six en alternance en 2020 : mission impossible ?

Sandrine Chesnel Publié le
Un étudiant sur six en alternance en 2020. C’est l’objectif que s’est fixé Geneviève Fioraso, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Ce qui reviendrait donc à porter le nombre de jeunes en alternance dans l’enseignement supérieur de 160 000 à 391 300. Est-ce possible ?

S'il y a une question sur laquelle le gouvernement actuel ne se distingue pas beaucoup du précédent, c’est bien celle des formations en alternance dans le supérieur. Comme avant elle son prédécesseur Laurent Wauquiez, la ministre de l’Enseignement supérieur semble appréhender la question de l’alternance dans l’enseignement supérieur sous l’angle du chiffre : mais là où Laurent Wauquiez espérait un étudiant sur 5 en alternance à l’horizon 2015, Geneviève Fioraso s’est fixé l’objectif d’un étudiant sur 6 en 2020.

A la rentrée 2010, 111 406 étudiants étaient en apprentissage, et s'il n’existe pas de chiffre précis sur le nombre d’étudiants en contrat de professionnalisation, on peut l’estimer sur la base des statistiques de la DARES à environ 50 000, soit un peu plus de 160 000 étudiants alternants. Ce qui équivaut à 7% des jeunes inscrits dans l’enseignement supérieur, soit moins de la moitié de l’objectif fixé par la ministre de l’enseignement supérieur.

Des chiffres encourageants pour 2011

Les chiffres de l’apprentissage pour l’année 2011, en hausse nette pour la 1ère fois depuis 2008, pourraient laisser penser que l’objectif est atteignable : entre 2010 et 2011, le nombre d’apprentis a augmenté de 2,5% par rapport à 2010, et de 11% dans les entreprises de 50 salariés et plus. Surtout, la part des jeunes en apprentissage dans le supérieur augmente constamment – aujourd’hui un apprenti sur quatre prépare un diplôme de l’enseignement supérieur.

Ces bons chiffres sont sans doute à mettre au crédit des aides financières à l’embauche des apprentis, aujourd’hui disparues, et aux efforts du gouvernement précédent, relayé par les CCI et les chambres de métiers et d’artisanat, pour mieux diffuser l’information sur les atouts d’une formation en alternance. Il est trop tôt pour savoir si l'année 2012 sera un aussi bon cru que 2011. Si le nombre de contrats d'apprentissage a augmenté entre septembre 2011 et septembre 2012, celui des contrats de professionalisation, lui, a baissé.

Un financement qui  dépend de la conjoncture

Mais pour financer l'objectif d'un étudiant sur six en alternance, il faut plus que des intentions : une hausse conséquente des budgets consacrés à l'alternance est incontournable. Aujourd'hui, le financement des contrats en apprentissage et des contrats de professionnalisation repose, pour les premiers, sur les entreprises et les régions, et pour les seconds, sur les OPCA (Organisme paritaire collecteur agrée), et leur collecte auprès des entreprises.

Les ressources de l’alternance dépendent donc des choix d'investissement des régions, et de la santé des entreprises. Or de nombreuses régions revoient à la baisse leurs investissements dans l’alternance dans le supérieur, pour privilégier les niveaux infra bac. Et du côté des entreprises, leur contribution financière dépend de leur masse salariale – cette masse salariale diminuant, leur contribution globale ne pourra que diminuer. Dans ces conditions, où trouver les financements nécessaires au doublement du nombre d’apprentis dans le supérieur ?

Le nombre d'alternants : une question centrale ?

Et si la question n’était pas là ? Pour l’ANAF (Association nationale des apprentis de France) la question du nombre d'alternants est loin d'être centrale. La jeune association souligne notamment le nombre toujours très élevé de ruptures de contrat d’alternance (1 sur 5), et plaide pour un accompagnement des jeunes avant et après la signature de leur contrat, et une meilleure formation des tuteurs.

Sont pointées également les difficultés rencontrées par les jeunes pour trouver une entreprise, et, une fois le contrat signé, assurer leurs déplacements et trouver un logement. Pour l'ANAF comme pour beaucoup d'acteurs de l'alternance, la priorité n'est donc pas d'augmenter le nombre de jeunes formés en alternance, mais bien de mieux accompagner ceux qui sont déjà en contrat d'apprentissage ou de professionalisation.



Pour aller plus loin

- "L'apprentissage en 2011"
, DARES Analyses, novembre 2012

- Les chiffres de l'emploi en septembre 2012, DARES, septembre 2012

Sandrine Chesnel | Publié le