Les condamnations pour plagiat ne sont pas courantes dans le monde universitaire français, et le cas de Christine Marchal-Sixou fait de ce point de vue exception. Objet du délit : la reprise, dans sa thèse d'odontologie présentée fin 2006 à Paris 5, d'une bonne part des 50 pages d'un mémoire de master 2. Son auteur, Samer Nuwwareh, avait soutenu celui-ci trois mois plus tôt, à l'université de Toulouse 3, son travail ayant été co-dirigé par… Michel Sixou, l'époux de Mme Sixou, et Thierry Lang, enseignant-chercheur à Toulouse 3.
Le tribunal a reconnu la contrefaçon en soulignant qu'elle "est d'autant plus inacceptable qu'elle a été commise dans le cadre d'une thèse portant sur le domaine de l'éthique médicale".
Le 19 décembre 2013, Mme Marchal-Sixou était ainsi condamnée à 5.000€ d'amende et 25.000€ de dommages et intérêts. La justice ordonne en outre la destruction de la thèse dans les bibliothèques universitaires de France, son retrait du site de l'Inserm et l'affichage de la décision à Toulouse 3 et Paris 5.
Quant à Michel Sixou, devenu par la suite doyen de la faculté de dentaire de 2008 à 2013 et l'un des vice-présidents délégués de Toulouse 3 (2008-2012), il était mis en examen pour complicité.
L'enseignant a été relaxé, mais les juges ont considéré qu'il "ressort clairement du dossier que Samer Nuwwareh n'a, au fond, été pris comme étudiant par Michel Sixou qu'afin de travailler dans le domaine de recherche de son épouse Christine Marchal". Des éléments qui "relèvent de l'éthique et de la déontologie", mais pas d'une "complicité au sens pénal".
Précisons qu'en 2008, une autre plainte, en escroquerie, avait été déposée par Patrick Lavernhe – aujourd'hui décédé – mais aboutissant à un non-lieu. Il mettait en cause Mme Sixou pour avoir obtenu frauduleusement son poste de MCU-PH (ils étaient alors les deux seuls à y candidater).
Pétition adressée à Geneviève Fioraso
L'affaire scandalise. Une vingtaine d'universitaires viennent de cosigner un texte publié sur le blog de Jean-Noël Darde, spécialisé sur le plagiat. Ils pointent la passivité des instances universitaires concernées tout en révélant la reprise litigieuse d'un autre texte dans la thèse de Christine Marchal-Sixou. Les pétitionnaires appellent Geneviève Fioraso à ouvrir une enquête via l'IGAENR (Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche).
"Le plagiat universitaire est répandu – celui-là étant exceptionnel par son ampleur –, mais ils ne sont malheureusement pas traités par les universités. Or, c'est la première fois que la justice adresse un cinglant désaveu à des instances universitaires qui, dans ce cas de fraude grave, n'ont pas réagi depuis sept ans", souligne Michelle Bergadaà, experte internationale du plagiat, citée à titre de témoin par le TGI (tribunal de grande instance) de Paris.