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Université : la réussite en licence ne décolle (toujours) pas

Aurore Abdoul-Maninroudine Publié le
Université : la réussite en licence ne décolle (toujours) pas
La réussite en licence ne progresse pas. // ©  JPGPhotos / UT1 Capitole
27 % des étudiants inscrits en première année de licence en 2011 ont obtenu leur licence trois ans après. Un chiffre d'une incroyable stabilité, qui soulève la question de l'efficacité des mesures en faveur de la réussite en licence.

Les années passent et les chiffres se ressemblent. Depuis 2008, malgré les diverses mesures prises en faveur de la réussite en licence, le taux d'obtention du diplôme en trois ans est d'une intrigante stabilité et se maintient autour de 27 %.

Une tendance longue confirmée par les derniers chiffres ministériels publiés mercredi 22 novembre 2016, qui concernent les étudiants inscrits pour la première fois en licence en 2011-2012. Ce taux grimpe à 39 %, contre 40 % l'an dernier, si l'on prend en compte les étudiants ayant eu besoin d'une année supplémentaire.

"En étant provocant, je dirais que je suis plutôt rassuré que ce taux ne se soit pas dégradé, vu l'évolution de la population étudiante au cours des dix dernières années et les contraintes budgétaires auxquelles les universités sont soumises", réagit de son côté Gilles Roussel, président de la commission formation de la CPU (Conférence des présidents d'université) et candidat à la présidence de cette instance.

Dans la note ministérielle "Parcours et réussite aux diplômes universitaires", les auteurs expliquent la légère baisse du taux de réussite en licence observée par rapport à l'an dernier par "une forte augmentation du nombre de bacheliers professionnels inscrits en licence suite à la réforme de la voie professionnelle" au lycée.

Entre 2005 et 2014, selon "L'État de l'enseignement supérieur et de la recherche", la proportion de bacheliers professionnels inscrits en première année de licence est ainsi passée de 2,6 % à 6,2 % des effectifs, tandis que celle de bacheliers technologiques est restée stable.

Le bac, un facteur déterminant

La filière du baccalauréat est l'un des facteurs le plus déterminants de la réussite en licence : quand près d'un bachelier général sur deux obtient sa licence en trois ou quatre ans, seuls 16 % des bacheliers technologiques et 6 % des bacheliers professionnels valident leur diplôme. Les étudiants issus de ces deux dernières filières représentent pourtant plus de 20 % des effectifs en L1.

La mention obtenue au bac est également fortement corrélée au taux de réussite. Si les étudiants ayant obtenu une mention très bien ne représentent que 2 % des inscrits en première année de licence, 71 % d'entre eux valident leur licence en trois ou quatre ans. À l'inverse, parmi les étudiants ayant obtenu leur bac sans mention et sans passer par la case rattrapage, seuls 20 % obtiennent in fine leur diplôme.

Enfin, avec une différence de dix points entre les taux de réussite, les filles réussissent bien mieux que les garçons : 43 % des étudiantes obtiennent leur licence en trois ou quatre ans, contre un tiers des étudiants.

Valider sa L1, un cap à franchir

La note met également en évidence l'écueil que constitue la première année de licence :  parmi les étudiants inscrits pour la première fois en 2012 en L1, plus d'un tiers a abandonné après un an et 13 % après deux années... En revanche, une fois ce cap franchi, près de 8 étudiants sur 10 valident leur dernière année de licence générale en un an

Quel est l'impact de la loi Fioraso sur la réussite en L1 ? "Le problème autour de la réussite en licence se situant principalement autour de la première année, l'impact de la loi de 2013 ne se verra que dans quelques années, lorsqu'on étudiera les cohortes inscrites en L1 en 2015 ou 2016", assure le secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, Thierry Mandon, interrogé par EducPros. Selon lui, "la mise en œuvre de quotas de bacheliers professionnels et technologiques en BTS et IUT porte déjà ses fruits".

"Nous avons constaté à la rentrée 2016 une forte augmentation des bacheliers généraux inscrits en L1 ainsi qu'une baisse des bacheliers technologiques et professionnels, ce qui devrait se traduire par une augmentation du taux de réussite en licence en trois ans", assure Thierry Mandon, optimiste.

Pour Gilles Roussel, au-delà d'une meilleure orientation, l'université doit surtout "diversifier son offre de formation pour qu'elle corresponde mieux aux besoins des étudiants, avec des années de remise à niveau, des DU d'orientation..."

LA réussite en licence université par université

Le ministère publie également le taux de réussite observé et attendu en licence en trois ou quatre ans, université par université. EducPros a réalisé ce tableau à partir de la valeur ajoutée de chaque établissement. Les universités d’Angers, Clermont-Ferrand, Corse, Poitiers et Marne-la-Vallée sont celles qui favorisent le plus la réussite de leurs étudiants selon cet indicateur controversé (voir encadré). A l’inverse, les universités de Lille-2, La Réunion, de Nouvelle-Calédonie et Lille 3 ont la plus faible valeur ajoutée.

La valeur ajoutée dans la réussite en licence

Ce tableau indique la valeur ajoutée de chaque université dans la réussite en licence en trois ans via la "méthode 1" du ministère, selon laquelle la réussite des étudiants est attribuée à l'université dans laquelle les étudiants se sont inscrits en première année, quel que soit leur parcours ultérieur.

La valeur ajoutée correspond à la différence entre deux taux : le taux réel observé et le "taux simulé", qui, lui, prend en compte les caractéristiques des étudiants de l'établissement (retard au bac, type de bac, profession des parents, etc.), plus ou moins favorables à leur réussite. L'idée est de mieux faire apparaître l'apport réel de chaque université dans la réussite de ses étudiants.

Les indicateurs de la réussite en licence "n’offrent qu’une vision partielle de la réussite dans l’enseignement supérieur", assume l'auteur de la note ministérielle annuelle. Soulignant notamment deux limites :
– "Seules les réorientations au sein de l’université sont prises en compte. En revanche, les bifurcations vers des filières autres qu’universitaires (formation paramédicale ou sociale, école d’ingénieurs, par exemple) ne sont pas prises en compte ;
– les indicateurs sont calculés sur la base des inscriptions administratives, et non d’une présence effective de l’étudiant."


Aurore Abdoul-Maninroudine | Publié le