"On veut du vert !" Au travers de son slogan "We mean Green !", l’University North Texas (UNT), située à Denton, dans la banlieue de Dallas, a le mérite d’annoncer une couleur, prenant le contre-pied des idées défendues au Texas, ce pays de l’or noir et du gaz de schiste. "Au départ, ce slogan ne vient pas de la couleur verte, explique John Coleman, un étudiant en génie mécanique. C’est un jeu de mots avec le nom de Joe Greene, qui reste à ce jour le meilleur joueur de football américain ayant fait ses classes à l’UNT. C’était dans les années 1960."
Un campus économe en énergie
Depuis, l’université a fait du vert sa couleur étendard allant jusqu’à faire labelliser "Leed", l’équivalent américain du bâtiment basse consommation (BBC), la totalité de ses nouveaux équipements, et même son stade de football américain de 31.000 places, qui dispose d'éoliennes servant à l’alimenter en électricité.
"L’Etat du Texas a subventionné ces éoliennes à hauteur de 2 M$ [1,5 M€, ndlr]. C'est le premier stade universitaire à avoir obtenu – dès 2011 – une certification Leed Platine [le plus haut niveau du label, ndlr] aux Etats-Unis", signale Lauren Helixon, chargée du service développement durable de cette université membre, depuis cinq ans, de l’American College and University Presidents' Climate Commitment (ACUPCC). Rassemblant 676 membres à travers les Etats-Unis, ce réseau, créé en 2006, vise à échanger sur les bonnes pratiques permettant de réduire l'empreinte carbone des établissements.
Selon les calculs de la faculté, près de la moitié de l'énergie consommée sur le campus provient de sources renouvelables, et prochainement l’UNT devrait économiser 3 M$ (2,25 M€) par an grâce à un nouveau projet de smartgrid (réseau intelligent) étendu sur quelque 120 bâtiments existants.
Le DD, axe de formation et de recherche
Côté formation aussi, l’UNT s’engage dans le développement durable avec une offre d’environ 300 matières dédiées au sein de 39 départements. Plus de 250 chercheurs mènent des travaux liés au développement durable, et l’université héberge un cluster de recherche tourné vers le recyclage des produits issus de la consommation et de l'industrie à l'aide de plantes et de bactéries, et vers les biotechnologies.
L’engagement de cette université du Texas, pays du pétrole et du gaz de schiste, a de quoi surprendre de prime abord mais Lauren Helixon le justifie simplement : "Le développement durable n’est pas ici une lubie née du débat, somme toute récent, sur le réchauffement climatique. Depuis les années 1930, l’UNT travaille sur les questions de rareté, de préservation, et de potabilité des ressources en eau, une problématique majeure au Texas."
Par certains aspects, l'UNT fait figure de pionnier aux États-Unis. Après avoir été la première université américaine à créer un master en tourisme durable, elle a mis en place un laboratoire baptisé "Énergie zéro". Son but : "concevoir et tester des technologies vertes permettant d’obtenir une consommation d’énergie la plus infime qui soit", affirme Yong Tao, directeur du département de génie mécanique.
D’une manière générale, de la première année au doctorat, toutes les formations, de la géographie au droit en passant par les sciences appliquées, intègrent en plus ou moins grande proportion, la notion d’environnement.
Financer les projets verts grâce aux inscriptions… et au pétrole
Afin que chacun participe à la politique de développement durable de l’UNT, 10 $ (7,5 €) sont prélevés sur chacune des 36.000 inscriptions enregistrées chaque année. "Cet argent est ensuite destiné à un fonds qui nous sert à financer des projets verts choisis par les étudiants eux-mêmes", explique Lauren Helixon, qui gère, dans son service de cinq salariés auxquels s’ajoutent des étudiants volontaires, un budget annuel de 500.000 $ (375.000 €). En 2013, le fonds a permis la constitution d’un jardin de plantes dont seront tirés des colorants naturels destinés aux étudiants en arts.
Mais ce campus si particulier ne serait pas tout à fait américain si l'on n'y cultivait pas un sens aigu du paradoxe. Depuis plusieurs mois, un puits de gaz de schiste perfore la terre en lisière de campus. Puisque le contenu de son sous-sol est exploité, l'université reçoit des émoluments de la compagnie pétrolière. "Il y a eu des contestations mais, que voulez-vous, la communauté a besoin de cet argent", résume Esteban, un étudiant en immobilier.
Ainsi, malgré ses velléités vertes, l’UNT s’est accommodée de ce voisinage incongru. Et Lauren Helixon d'affirmer : "En contre-partie, ce revenu nous permet d’améliorer notre politique de développement durable."
Consulter :
• le site de l’UNT et celui de son service développement durable.
• le site de l'American College and University Presidents' Climate Commitment.