Un grand établissement dénommé Université de Lorraine, regroupant l’Institut national polytechnique de Lorraine et les universités de Metz, Nancy 1 et Nancy 2, a été créé par décret en date du 22 septembre 2011. Saisi en urgence par l’UNEF (reféré), le Conseil d’État vient de rejeter le recours en expliquant qu’il n’y avait pas d’atteinte immédiate aux intérêts des étudiants consécutivement à la création du grand établissement Université de Lorraine. On voit mal désormais pour quelle raison les grands établissements ne seraient pas généralisés à toutes les universités qui décideraient de fusionner avec une école d’ingénieurs ou une école de commerce.
Les grands établissements : une catégorie en voie de banalisation
Les grands établissements ne répondent à aucune définition précise permettant d’établir leur spécificité. Ils doivent simplement avoir été créés par décret en Conseil d’État (art. L 717- 1 du Code de l’éducation). Avec la réforme LMD et les nombreuses tentatives de rapprochement entre les universités et les écoles privées, ils semblent promis à un bel avenir.
Les conditions d’accès aux diplômes nationaux en seront nécessairement modifiées, mais il est encore trop tôt pour savoir quel en sera l’impact pour les étudiants : sélection des candidats, augmentation des droits d’inscription…
Le statut de grand établissement : une catégorie à géométrie variable
Les juges du Conseil d’État ont déjà eu l’occasion de se prononcer sur la création d’un grand établissement en 2005, au moment de la transformation de l’université Paris-Dauphine en université de technologie en sciences des organisations et de la décision (arrêt du 8 juillet 2005).
Le Conseil d’État avait alors entériné les mesures contenues dans le décret de création de ce grand établissement universitaire (décret du 26 février 2004), et notamment la possibilité qui lui était offerte de délivrer des diplômes nationaux et des diplômes propres à recrutement totalement libéralisé.
Le décret du 22 septembre 2011 créant l’Université de Lorraine semble, quant à lui, plus soucieux de rappeler le principe de l’accès au premier cycle pour tous les titulaires du baccalauréat, tout en maintenant le principe de la sélection pour l’accès aux instituts et aux écoles du grand établissement (art. 2 du décret).
L’intérêt des étudiants à court et à plus long terme
Dans son arrêt rendu le 15 décembre 2011, le Conseil d’État rejette le recours de l’UNEF. Les juges considèrent que la création du nouvel établissement n’a pas dans l’immédiat d’effets préjudiciables pour les étudiants et en particulier qu’il n’entraîne pas la suppression de formations par le regroupement de celles-ci sur un nombre limité de sites. Cette motivation du jugement semble rejoindre l’argumentation en défense présentée par le ministère de l’Éducation qui voyait dans la création de l’Université de Lorraine un enrichissement de l’offre de formation.
L’argument n’est pas sans valeur, mais il mériterait d’être précisé. Le Conseil d’État, qui était saisi en urgence, a, lui, mis en avant la sauvegarde de l’offre de formation existante, mais les étudiants aimeraient sans doute connaître sa position sur leur intérêt à plus long terme à voir se généraliser les grands établissements mixtes public/privé .
Arrêt du Conseil d’État du 15 décembre 2011
D'autres cas décryptés par Yves Le Duc sur droitdesexamens.blogspot.com et droitdesdiplomes.blogspot.com .