Le prix annuel moyen des écoles de commerce post-prépa est passé de 9.907 euros à la rentrée 2014 à 10.252 euros à la rentrée 2015, passant ainsi le seuil symbolique des 10.000 euros. L'augmentation moyenne sur cette même période est de 346 euros.
Certaines écoles ont toutefois connu une hausse de l'ordre de 10%. C'est le cas d'HEC (+ 1.300 euros), de l'ESCP Europe (+ 1.167 euros) et de l'ISC (+ 950 euros). HEC détient ainsi un double record : la plus forte augmentation de l'année et les frais de scolarité les plus élevés, soit 13.500 euros (ex-æquo avec l'Essec).
le seuil des 10.000 euros atteint dans quatre ans pour les écoles postbac
La majoration moyenne du prix annuel des écoles postbac s'élève, elle, à 379 euros. Les hausses beaucoup plus importantes sont rares. Notons toutefois : + 640 euros pour l'EM Normandie, + 600 euros pour l'Ipag et + 480 euros pour EBS.
Une seule école postbac a, pour le moment, franchi les 10.000 euros par an. Il s'agit de l'ESCE. "Nous ne sommes pas plus chers que nos concurrents. Nous affichons un montant tout compris, tandis que d'autres font payer les cursus à l'étranger, les années de césure ou encore les rattrapages", se défend Jérôme Caby, directeur de l'ESCE. L'école ne perçoit plus du tout de taxe d'apprentissage depuis la rentrée 2015, soit près d'un million d'euros par an de recette en moins. Quasiment l'intégralité des ressources de l'ESCE provient des frais de scolarité.
Si ceux-ci continuent d'augmenter comme ils l'ont fait entre 2014 et 2015, le coût moyen des écoles postbac atteindra lui aussi ce seuil symbolique de 10.000 euros dans quatre ans seulement. Les cinq années d'études avoisineront alors les 50.000 euros.
Une prévision réaliste au regard de la baisse, voire de la disparition, des aides de l'État (taxe d'apprentissage, dotations des Chambres de commerce et d'industrie), et de l'évolution durable des tarifs. "En vingt ans, les frais de scolarité ont été multipliés par deux et demi, écrit l'Institut Montaigne dans un rapport publié en 2014. En 1994, les trois années passées dans une business school coûtaient, au total, entre 100.000 et 110.000 francs – soit 15.000 à 16.000 euros."
Les écoles de commerce : un investissement
Jérôme Caby avoue ne pas pouvoir, dans l'immédiat, augmenter le prix de l'ESCE de manière trop importante. Mais il ne voit pas non plus comment le modèle économique des écoles pourrait changer. "Je sais d'expérience que le fundraising, les dons des anciens et des entreprises, demande beaucoup de temps et offre peu de résultats pour les écoles qui ne figurent pas parmi les cinq meilleures", confie-t-il.
Selon lui, seul un changement d'état d'esprit pourrait arrêter la polémique sur le montant des frais de scolarité. "Un étudiant inscrit à l'université coûte en moyenne un peu plus de 11.000 euros à l'État. L'ESCE est moins chère", rappelle Jérôme Caby, avant de poursuivre : "En France, contrairement aux pays anglo-saxons, on ne voit pas l'enseignement comme un investissement. On pense que c'est à l'État de payer."
Qu'on arrête de montrer du doigt le prix des écoles de management : elles ne coûtent rien à la collectivité et ne produisent pas de chômeurs. (B. Belletante)
Un avis notamment partagé par Bernard Belletante. "Qu'on arrête de montrer du doigt le prix des écoles de management : elles ne coûtent rien à la collectivité et ne produisent pas de chômeurs. Est-ce mal ?" questionne le directeur général de l'EM Lyon, école qui a connu une hausse de ses frais annuels de 1.967 euros entre 2013 et 2015.
Selon lui, les 10.000 euros ne constituent pas une ligne rouge. "Les étudiants comparent le tarif de leur cursus avec le salaire à un an et trois ans après leur sortie et constatent que le jeu en vaut la chandelle", assure-t-il. "Le prix des business schools françaises équivaut environ à un an de salaire d'un jeune diplômé. Il peut encore augmenter, jusqu'à représenter 18 mois de salaire. C'est pour moi le seuil d'acceptabilité des étudiants", ajoute-t-il.
Le montant moyen d'une école de commerce s'élevant à 35.387 euros, et le salaire de sortie à 33.737 euros, Bernard Belletante fixe donc la limite à environ 52.400 euros. Certains établissements en cinq ans sont très proches de ce montant, comme l'ESCE (51.150 euros), l'Iéseg (45.990 euros) et l'Essca (45.950 euros).
Une augmentation inéluctable
Jusqu'où les écoles peuvent-elles aller ? Loïck Roche, directeur de Grenoble école de management et président du Chapitre des écoles de management de la CGE (Conférence des grandes écoles), a répondu à cette question sur son blog en septembre 2015. Il fixe un plafond par école : 120.000 euros (voire plus) pour trois années à HEC ; entre 60.000 et 70.000 euros pour l'Essec et l'ESCP ; 50.000 euros pour l'EM Lyon et l'Edhec ; 40.000 euros pour les établissements qui suivent directement dans les classements. Les autres seraient à un montant maximum ou trop onéreux.
"120.000 euros ? Je ne sais pas si HEC atteindra un jour ce montant-là", s'amuse Bernard Ramanantsoa. L'ancien directeur d'HEC est, lui aussi, convaincu que les écoles françaises, deux à trois fois moins chères que leurs concurrentes anglaises et espagnoles, vont devoir augmenter leur prix en l'absence de business plan alternatif. "Les marges dégagées par la formation continue se dégradent en raison de la concurrence du numérique et le fundraising ne va pas faire des miracles. Ce dernier va seulement mettre du beurre dans les épinards des meilleures écoles", affirme-t-il.
Les business schools n'ont pas d'autre choix que d'accroître leur prix. Reste à savoir si les cursus meilleur marché, comme ceux des IAE (instituts d'administration des entreprises), ne détourneront pas une partie de leur public. "Les étudiants suivront. Le critère n'est pas le nombre de candidats par rapport au nombre d'admis, mais l'excellent taux d'emploi", soutient, confiant, Bernard Ramanantsoa. "La vraie question est celle de la vitesse à laquelle les écoles augmentent leur tarif. Une hausse trop rapide peut véritablement amener les étudiants à les bouder", conclut-il.
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Fond bleu : écoles accessibles dès le bac.
Fond blanc : écoles accessibles à partir de bac + 2.
Labels internationaux : E (Equis), A (AACSB), e (EPAS), a (AMBA-MBM)
Concours : BCE (banque commune d'épreuves)
Statut : Co : consulaire ; Pr : privé ; Pu : public.
/ : école non accréditée.
Brest BS n'a pas souhaité participer à notre palmarès cette année.
* Hors formule d'apprentissage (pas de frais de scolarité).
"Les coûts de scolarité élevés des business schools dissuadent, dès l'inscription en classe préparatoire, une partie des étudiants les moins favorisés", peut-on lire dans un rapport publié en 2014 par l'Institut Montaigne.
Les directeurs des différents établissements s'entendent pour dire que les bourses, l'alternance, et notamment les prêts sans garanties et sans intérêts suffisent à préserver des inégalités d'accès. Ils assurent qu'il est par ailleurs simple d'obtenir et de rembourser un prêt pour un jeune manager, quel que soit son milieu social. "Il y a toutefois de l'autocensure de la part de certains étudiants modestes qui se disent que les écoles sont faites pour les riches. Ce n'est pas vrai !", s'insurge Bernard Belletante, directeur général de l'EM Lyon.
Cassandre Bliot, responsable à l'Unef des questions liées à l'enseignement supérieur (Union nationale des étudiants de France), fait un tout autre constat : "Les bourses attribuées sur critères sociaux sont insuffisantes. Par conséquent, plus les frais de scolarité des écoles augmentent et plus les classes populaires en sont exclues".