"Notre école est devenue un campus numérique grâce à Moodle" : Magali Barkatz est ravie. L'école de commerce pour laquelle elle travaille, l'Ipag, utilise cette plate-forme d'apprentissage en ligne depuis 2015. "Enseignants, étudiants et parents disposent chacun de leur espace de connexion", détaille la directrice administrative et numérique de l'établissement implanté à Paris et à Nice.
En quelques clics, les étudiants peuvent consulter leur planning, les actualités de l'école, l'annuaire des anciens et, bien sûr, leurs cours, disponibles sous forme de quiz, de vidéos, de sondages ou encore de questionnaires.
Une vaste communauté de développeurs
Moodle, abréviation de Modular object-oriented dynamic learning environment [Environnement orienté objet d'apprentissage dynamique modulaire] a été créé en 2002, par un doctorant australien. Plate-forme au code source ouvert, l'outil offre l'avantage de s'améliorer continuellement grâce à sa vaste communauté de développeurs, qui met les codes informatiques en libre accès, sur un forum dédié.
"L'origine universitaire et la vaste communauté internationale participent à son succès dans les établissements d'enseignement supérieur, constate Thierry Koscielniak, directeur de la pédagogie numérique à l'université Paris-Descartes, qui estime à 86 % le nombre d'universités françaises qui utilisent actuellement la plate-forme. Les expérimentations, toujours possibles en open source, permettent aussi à ce public d'innover."
L'origine universitaire et la vaste communauté internationale participent à son succès dans les établissements d'enseignement supérieur.
(T. Koscielniak)
20 euros par an, par étudiant
À l'Ipag, le basculement vers Moodle ne s'est pas fait en un jour. "Nous n'avons pas les compétences en interne pour porter, seuls, de tels changements", concède Magali Barkatz. L'établissement s'est donc adjoint les services d'Edunao, une entreprise française qui livre, clé en main, des plates-formes d'apprentissage construites à partir de Moodle. Coût de l'opération : 20 euros par an et par étudiant.
C'est là toute la spécificité de l'outil, open source : le logiciel peut être installé directement par les établissements sur leurs serveurs, librement et sans coût de licence. Pour ceux que l'opération effraie, Moodle a fédéré autour d'elle des entreprises, estampillées "partenaires Moodle". Elles peuvent utiliser le logiciel, à condition de reverser l'équivalent de 10 % de leur chiffre d'affaires annuel à la structure australienne.
Les établissements font évoluer l'outil
Membre de l'INP Toulouse, l'Enit (École nationale d'ingénieurs de Tarbes) a rejoint la galaxie Moodle en 2013. "Au début, les enseignants venaient seulement déposer leurs cours en PDF, en lieu et place de Dropbox. Ce n'était pas forcément très innovant", remarque Lionel Arnaud, enseignant-chercheur et chargé Tice au sein de l'école d'ingénieurs.
En 2015, l'Université fédérale Toulouse-Midi-Pyrénées, dont l'Enit fait partie, lance un appel d'offres pour rendre les cours plus interactifs sur Moodle. Accompagné dans sa démarche par Edunao, l'établissement tarbais s'engage alors dans un gros travail d'amélioration de l'ergonomie et de l'interface graphique, réputées peu attractives.
"Trois quarts de nos enseignants trouvent que la prise en main de Moodle n'est pas intuitive, pointe Lionel Arnaud. Nous développons actuellement une extension en version anglaise et française pour y remédier." Une fois testé et approuvé, le plug-in sera déposé sur la plate-forme, pour pouvoir profiter au reste de la communauté.
Certains résistent encore
Si Moodle séduit de plus en plus d'établissements, certains préfèrent néanmoins utiliser d'autres outils. C'est le cas de l'université Paris-Dauphine. "Depuis plusieurs années, nous utilisons Blackboard. C'est une solution clef en main, utilisée par plus de 400 enseignants pour nos formations initiales et continues, précise Élisabeth Lacaze, codirectrice du centre d'ingénierie pédagogique de l'établissement parisien. L'outil offre un gros avantage : l'administration ne nécessite pas de personnel en interne." Coût de l'opération : environ 10 euros par an et par étudiant.
Ce projet à long terme nous permet déjà de suivre plus finement nos apprenants, grâce aux statistiques. C'est l'apprentissage du futur !
(M. Barkatz)
Les données, "pour améliorer les cours"
Moodle, Blackboard... Quel que soit l'outil choisi, Thierry Koscielniak est formel : l'enseignement supérieur est voué à s'appuyer de plus en plus sur les plates-formes d'apprentissage en ligne. "Les learning analytics, ces statistiques collectées pendant les actions des apprenants sur la plate-forme, peuvent contribuer à l'amélioration des cours", fait-il valoir. Un point de vue confirmé par Magali Barkatz, de l'Ipag : "Ce projet à long terme nous permet déjà de suivre plus finement nos apprenants, grâce aux statistiques. C'est l'apprentissage du futur !"
"En France, nous travaillons en lien étroit avec la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés) sur le sujet..." tient à rappeler Thierry Koscielniak. Interdite en Allemagne, la collecte des données issues des actions effectuées sur ces plates-formes est, en revanche, complètement autorisée aux États-Unis.