Pourquoi êtes-vous candidate à la présidence de la CPU ?
Il est nécessaire, dans une élection démocratique, d’avoir deux équipes en lice. Nous nous présentons pour interroger la politique menée ces deux dernières années, et défendre une autre ligne pour la CPU que celle portée par le bureau actuel.
Qu’est-ce qui doit changer à la CPU ?
Le positionnement politique doit changer : aujourd’hui, le bureau est dans la ligne du ministère, il partage ses positions. Pour nous, la CPU ne peut continuer dans cette voie. Elle ne doit plus être dans ce soutien systématique au ministère, en jouant simplement le rôle de courroie de transmission.
Je sais bien que le rôle du bureau est difficile, j’ai été vice-présidente pendant deux ans. On se situe entre le ministère et les présidents, et il faut trouver une juste mesure entre la transmission d’informations aux établissements et la remontée des positions des universités vers le ministère. Il est important de garder une vraie indépendance, ce qui n’est pas le cas actuellement.
Beaucoup de débats sont étouffés, en raison de cette entente avec le ministère, afin de ne pas avoir de position divergente. Ce n’est pas comme ça que l’on peut faire changer les choses.
Vous défendez donc une CPU qui s’oppose plus fortement au ministère ?
Il ne s’agit pas pour autant de développer une opposition systématique. Mais il faut arrêter d’être dans l’acceptation de ce qui est décidé par le ministère, et dans ce rôle permanent de facilitateur de décisions auprès des établissements.
La CPU n’a pas à organiser une formation, comme elle l'a pourtant fait, sur le thème : "Budget : assurer un équilibre durable, les raisons du dérapage et les moyens de rattrapage". Sous prétexte d’une thématique technique, elle prend position sans le dire, en faisant passer le message du ministère selon lequel les présidents seraient responsables de la situation financière des universités parce qu’ils auraient mal géré leurs établissements.
Nous ne proposons ni une CPU d’opposition, ni d’acceptation. Son rôle n’est pas d’être en quête de révolution, et si nous sommes vus comme un bureau d’opposition, ce n’est pas notre état d’esprit. Nous voulons que la Conférence retrouve sa place de force de proposition et d’alerte.
Plusieurs motions ont tout de même été portées par le bureau actuel, en contestation du ministère...
Depuis deux ans, les sujets importants, qu’il s’agisse des regroupements universitaires ou de la réforme du modèle de répartition des moyens, ne sont plus mis en débat devant l’ensemble des présidents à la CPU. Ils peuvent être abordés en commission, mais il n’y a plus de vrais débats, ni de prises de position forte qui en découleraient.
Quant à certains points de vue affirmés par le bureau, je ne suis pas certaine qu’ils soient véritablement ceux de la CPU, faute de discussions en amont.
La CPU doit redevenir un lieu de débat et de discussion. Il faut arrêter de mettre la poussière sous le tapis. Sinon à quoi sert-elle ? S’il s’agit de réunir les présidents pour leur expliquer ce que le ministère a décidé, cela n’a pas grand intérêt.
Un exemple sur la sélection en master. Depuis le jugement du tribunal de Bordeaux, légalement, nous ne devrions plus pouvoir sélectionner du tout entre le master 1 et le master 2. Nous avons demandé à l’État un décret pour régulariser la situation, pour permettre cette sélection ou bien la placer à l’entrée du M1. Résultat : le ministère a indiqué qu’il ne toucherait à rien. Cela met les universités dans des difficultés extrêmes, risquant des procès de leurs étudiants, et rien ne se passe pourtant. Sur ces sujets cruciaux, la CPU doit défendre une position commune, bien plus fortement.
Le gouvernement nous dit qu’il tient sa priorité Jeunesse, mais les preuves ne sont pas là, bien au contraire
Le budget est la principale préoccupation des présidents en cette période de restrictions. Pensez-vous que vous le défendriez mieux que le bureau précédent ?
Ce n’est pas la question : c’est le ministère qui décide, la CPU n’a pas le pouvoir de l’infléchir. En revanche, il faut remettre le débat à un autre niveau. Jusqu’ici, les revendications de la CPU se limitent beaucoup à essayer de rattraper de ce qu’on tente de nous enlever.
Encore récemment - juste avant les élections à la présidence de la CPU d’ailleurs – le ministère nous a rendu l’argent qu’on menaçait de nous prendre, en 2014. C’est très bien, mais c’est un peu facile.
On nous rend sans grandes difficultés ce qu’on a annoncé qu’on allait nous prendre. C’est la même chose concernant les CPER (contrat de projet État-région).
Et surtout : l'État nous rend toujours moins. C’est une façon de nous présenter comme des privilégiés, en nous enlevant toujours un peu plus. Il y a ce qu’on essaie de nous faire croire et la situation réelle : les universités ont des difficultés financières toujours plus importantes. Le gouvernement nous dit qu’il tient sa priorité Jeunesse, mais les preuves ne sont pas là, bien au contraire. La CPU doit porter une vision à plus long terme.
Vous êtes à la tête d’un ticket atypique pour la CPU puisqu’il compte deux femmes et deux présidents à la tête d’université de sciences humaines et sociales…
Personne ne trouve anormal d’être dirigé par trois hommes, comme c’est le cas actuellement. Avec un scientifique, un médecin et un économiste. De notre côté, nous sommes deux femmes, une littéraire et une historienne, ainsi qu’un scientifique. Est-ce si différent ?
Il est bon de bousculer les préjugés. Peut-être faut-il changer les mentalités pour que cela ne paraisse pas atypique. Moi ce qui me choque, c’est l’absence de femmes dans l’autre liste, alors qu’on parle de défendre la parité.
Dans tous les cas, nous ne portons absolument pas une candidature de témoignage, mais nous nous engageons dans une candidature de combat. Les présidents d’université ont aujourd’hui le choix entre deux visions très différentes pour la Conférence. Leur vote permettra de définir à quoi doit servir la CPU dans les deux années à venir.
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