Le budget de l’Universidad Complutense, comme celui de la plupart des universités publiques espagnoles, a été amputé depuis 2012 de 66 millions d’euros. Comment avez-vous surmonté cette crise ?
La crise n’est pas terminée, nous sommes encore dedans. Nos financements ont baissé de 18% en près de cinq ans. L’État, notre principale source de financement, a diminué ses subventions de 66 millions d’euros. Notre budget actuel s’élève à 538 millions.
Bien sûr, cela a été difficile. Et douloureux. Ce sont nos ressources humaines qui ont le plus souffert. Nous n’avons pas remplacé 400 professeurs qui sont partis à la retraite durant cette période. Et nous avons également 360 personnels administratifs en moins. Nous avons désormais 5.700 professeurs et 3.300 personnels administratifs.
Nous avons réussi à ne fermer aucun cursus ni laboratoire : nous avons opéré une grande restructuration, en réorganisant les enseignements, la répartition des enseignants et en développant les mutualisations. Seuls un certain nombre d’enseignements en option ont été supprimés.
Quelle est votre situation financière aujourd’hui ?
Nous sommes en train de discuter avec le gouvernement régional pour négocier un plan de financement sur les cinq prochaines années. Les six universités publiques de Madrid sont allées devant les tribunaux et les juges ont rendu leur verdict : le gouvernement régional va devoir nous rendre l’argent qu’il nous doit. Cela représente presque 500 millions d’euros pour nos six établissements. L’État ne les a pas aujourd’hui, en raison de la crise. D’où ce plan sur plusieurs années.
Nous avons par ailleurs accumulé une dette, comme beaucoup d’universités espagnoles, qui s’élève à près de 100 millions d’euros. Nous commençons un programme de remboursement, cette année à hauteur de 9 millions d’euros, et cela se fera progressivement sur les dix prochaines années.
Comment voyez-vous le futur pour la Complutense ?
Nous ne retrouverons pas le niveau de ressources d’avant, mais je pense que le budget de l’université ne va plus baisser. Certes, nous vivons un moment historique très difficile. Nous avons perdu de grands professeurs. Nos étudiants en phD doivent partir ailleurs pour travailler. Mais progressivement, nous allons pouvoir remplacer une partie de ces enseignants, et repartir dans un cycle positif.
Universidad Complutense de Madrid. // © CS Avril 2016
Les droits d’inscription ont augmenté et sont devenus une ressource importante de l’université, mais cela constitue un handicap pour la poursuite d’études d’un grand nombre de jeunes Espagnols…
C’est en effet une source de financement qui représente cette année 22% du budget, contre 18% en 2011. La communauté de Madrid, qui dispose de l’autorité pour fixer les droits d’inscription des universités publiques, les a fortement augmentés.
Le crédit ECTS, qui coûtait en moyenne 17 euros pour les étudiants inscrits dans une discipline pour la première fois, est passé à 27 euros. Selon les années d’études et les différentes conditions, les droits pour une matiére – soit 60 crédits ETCS – lors d’une première inscription s’échelonnent entre 1 458 euros et 1 782 euros par an par étudiant.
En face, les bourses de l’État ne sont plus suffisantes. 26.000 de nos étudiants y candidatent, 16.000 les ont obtenues cette année. Nous avons donc développé des bourses portées par l’université, avec une enveloppe de 1 million d’euros, attribuées pour une part en fonction de critères sociaux et pour une autre de l’excellence.
Quid des financements privés ?
Les financements privés ne sont absolument pas notre ressource essentielle, ils représentent une part mineure du budget : environ 5 millions d'euros par an sur 538 millions. La banque Santander est notre sponsor principal à ce niveau. Mais nous voulons bien sûr essayer d’augmenter ces fonds venant du privé.
Nous avons écrit à tous les enseignants et chercheurs pour leur dire que nous étions là pour les aider à développer des liens avec le monde économique. S’ils ont des idées de partenariats qui pourraient permettre de récupérer des fonds pour des projets, nous les encourageons et sommes là pour les accompagner. Nous devons collaborer plus, tout en gardant notre liberté.
La question de la sélection à l’entrée de l’université est en débat en France. C’est également un grand point d’interrogation chez vous actuellement…
Carlos Andradas : "Précisons que nous n’avons pas cette problématique, comme en France, de l’augmentation du nombre d’étudiants car notre "baby-boom" est arrivé il y a déjà quelques années à l’université. La tendance est plutôt à la baisse des effectifs qui frappent à la porte de l’enseignement supérieur.
En revanche, nous sommes en plein changement concernant le système d’entrée dans l’enseignement supérieur. Jusqu’ici, un examen intervient à la fin du lycée pour rentrer à l’université, au niveau national. Chaque bachelier classe ses demandes de filières universitaires. Selon ses résultats, il est classé, et obtient une place dans telle ou telle fac.
Une loi a été votée par le dernier gouvernement supprimant ce modèle au profit d’une sélection qui serait effectuée par chaque établissement. En attendant le prochain gouvernement, il y a une grande interrogation pour 2017, car tous les autres partis ont affirmé leur opposition à cette loi et leur volonté de l’abroger.
Pour ma part, je ne vois pas pourquoi casser un système qui marche bien jusqu’à présent. Il a l’avantage d’opérer une sélection de manière transparente et claire pour tous. Tout le monde sait pourquoi il a une place, ou pas. Si chaque université organise son examen d’entrée ou pose ses conditions, cela me semble risqué et propice aux suspicions."
La Conférence des présidents d'université, en partenariat avec l’Etudiant, lance le concours "1, 2, 3 Campus", organisé dans le cadre du colloque annuel de la CPU, qui aura lieu les 25, 26 et 27 mai 2016 à l'université d'Orléans et sera consacré à la vie de campus. Les participants sont invités à imaginer le campus idéal, en dessinant ou en photographiant leur campus, d'ajouter une légende en 140 caractères maximum pour décrire le lieu et l'esprit de l'image, puis de caractériser en trois mots ce campus. Photos ou dessins sont à envoyer par e-mail à communication@cpu.fr jusqu'au 25 mai 2016. Les trois lauréats dont les visuels récolteront le plus de "like" dans l'album 1, 2, 3 Campus de la page Facebook de la CPU seront récompensés à l'ouverture du colloque.