La Ville de Béziers soutient l'installation de l'université privée Fernando-Pessoa. La position du médecin est-elle différente de celle de l'élu ?
Je n'ai pas envie de faire la politique de l'autruche. Aujourd'hui, 20 à 25% de praticiens sur le sol français sont qualifiés avec un diplôme européen ou hors communauté européenne. En d'autres termes, l'étudiant français part pour trois fois plus cher étudier en Espagne, en Belgique ou au Portugal et revient en France pour exercer. Tout le monde se taisait car le problème ne se trouvait pas sous nos yeux. Cette université dit juste aux étudiants ayant raté leur 1ere année : "ne partez pas !"
Sur le côté aménagement du territoire, je n'ai pas d'opposition. Je veux avoir 600 étudiants d'ici 2016 en odontologie, en sciences médicales et paramédicales , je veux cette richesse intellectuelle, démographique et économique sur mon territoire. Oui, ce n'est pas académique et ce diplôme n'est pas le même que le mien qui suis médecin [Elie Aboud est diplômé de la fac de médecine de Montpellier, ndlr]. Je le regrette mais aujourd'hui des universités privées étrangères viennent exporter leur savoir-faire en France, et permettent à des étudiants qui seraient partis à l'étranger de rester dans leur pays et de payer moins cher leur scolarité, logement, etc.
Cette position semble paradoxale...
A partir du moment où le numerus clausus est détourné de manière voyante et stupide par cette migration des étudiants en médecine vers l'étranger, il faut être réaliste. Cette université ne s'installerait pas à Béziers s'il n'y avait pas le numerus clausus. Ce qu'il faut, c'est ne plus tolérer des gens formés ailleurs qui n'ont pas le même niveau de formations. On doit conserver en France une haute exigence de formation. Il faut faire exploser le numerus clausus et pouvoir former plus de médecins, de dentistes, de kinés car avec la démographie, on a besoin de ces professionnels de santé. C'est un vrai défi sociétal.
Le fait que la médecine soit dispensée par le secteur privé vous dérange-t-il ?
Evidemment que ça me dérange car ça crée une formation à deux vitesses entre ceux qui peuvent payer [9.500€ par an à l'université Fernando-Pessoa, ndlr] et ceux qui ne peuvent pas. Mais jusqu'à aujourd'hui, c'est 25 à 30.000€ par an, tout frais compris, que devaient payer les parents les plus aisés pour que leurs enfants aillent étudier à l'étranger. Alors entre 30.000€ à l'étranger et 9.500€ chez lui, l'élu local n'hésite pas.