Parcoursup : ce qui se cache derrière le "oui si" pour entrer en licence
"Oui si". Telle est la réponse que vous fera l'université si votre profil ne correspond pas aux attendus de la licence demandée sur Parcoursup. En clair : vous êtes accepté à condition de suivre un cursus aménagé. Avec un bémol : toutes les formations n'auront pas le temps de mettre en place ces dispositifs d'ici à la rentrée 2018.
Futurs bacheliers ou étudiants en réorientation : si vous ne répondez pas aux attendus de la licence que vous avez demandée via Parcoursup, l'université devrait vous répondre "oui si". Vous devrez comprendre : "Vous avez une place dans la formation si et seulement si vous acceptez de suivre un parcours personnalisé". Cela pour augmenter vos chances de réussite en licence.
En quoi consistera ce parcours ? C'est là que le bât blesse : pour l'instant, les informations sont rares. Les universités promettent simplement "de faire au mieux pour la rentrée 2018".
Des parcours longs à mettre en place
Frédérique Vidal, la ministre de l'Enseignement supérieur, l'a assuré devant les députés : ces dispositifs seront prêts à temps. "Les enseignants-chercheurs sont partout à pied d'œuvre pour préparer de vrais parcours adaptés", garantit-elle.
Dans la pratique, si les universités ont effectivement mis le turbo, le démarrage en septembre 2018 devrait se faire à vitesse réduite. Dans la région académique Auvergne-Rhône-Alpes, la réflexion "n'est pas encore aboutie, soulignait Françoise Moulin-Civil, alors rectrice de l'académie, à la mi-février. C'est à la rentrée 2019 que nous aurons de véritables réalisations." Et Manuel Tunon de Lara, le président de l'université de Bordeaux, d'abonder dans ce sens : "Ces parcours demanderont encore deux ou trois années pour être installés."
Outre la question du calendrier serré se pose la question du budget. "Il faut voir si nous avons les moyens avant de déployer les dispositifs à grande échelle", explique Dominique Averty, vice-président formation de l'université de Nantes.
Une rentrée 2018 qui se fera avec les moyens du bord
Pour la rentrée 2018, les universités parent à l'urgence. La plupart ont choisi de puiser dans ce qui existe déjà et voient quels dispositifs elles pouvaient réactiver. Ainsi, à Bordeaux, l'université va se baser sur son semestre "rebond" en place en sciences et technologies pour construire un parcours en quatre ans mêlant remise à niveau et tutorat. À l'université de Nantes, qui expérimente déjà d'une licence en quatre ans en STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives), pour les étudiants volontaires, un parcours d'une durée similaire devrait aussi être proposé en sciences, avec un renforcement disciplinaire et un accompagnement des étudiants.
"Il y a deux grands types de parcours qui se dessinent, liés au profil des étudiants. À ceux qui ne sont pas trop éloignés du niveau requis, les universités proposeront du tutorat, avec quelques cours pour rattraper leur retard. Pour les élèves les plus en difficulté, on se dirige vers des cursus en quatre ans avec un accompagnement plus lourd", décrypte François Germinet, le président de l'université de Cergy-Pontoise.
Non au "oui si"
Si les dispositifs différeront selon les universités, ce sera également le cas d'une formation à l'autre. Certaines facultés ne proposeront tout simplement pas de "oui, si" l'an prochain, comme à l'université de Bretagne-Occidentale. "On ne forcera pas. Pour la rentrée 2018, nous mettrons en place ces parcours si l'on est sûr d'apporter un vrai bienfait aux étudiants", résume son président Matthieu Gallou.
Même écho à Nantes : "Nous n'aurons pas de parcours dans toutes les formations car nous voulons nous laisser le temps de la réflexion", expose Dominique Averty. Dans ce cas, son université réfléchit à un "mixte" entre "oui" et "oui, si". "Nous accueillerons les étudiants et certains pourront se raccorder à des parcours adaptés en cours d'année", illustre le vice-président.
C'est le choix qu'a fait également la faculté de lettres et sciences humaines de l'université d'Aix-Marseille, où tous les étudiants seront accueillis dans le cadre des "oui" sur Parcoursup dans la limite des capacités d’accueil. "Nous observerons comment ils s'en sortent avant de proposer à certains des parcours de remédiation deux ou trois mois après la rentrée", indique Thierry Paul, le vice-président formation de l'AMU.
Devrez-vous accepter une licence "à l'aveugle" ?
Une question reste en suspens : si on vous propose effectivement un "oui si" dans vos propositions d'admission sur Parcoursup (à partir du 22 mai), saurez-vous ce qui se cache derrière ?
Le ministère de l'Enseignement supérieur l'assure : les établissements détailleront les parcours de réussite lors de la proposition qui vous sera faite. "Cela me paraît évident de préciser s'il s'agit d'un parcours en trois ou quatre ans. Comment, sinon, un élève pourrait-il choisir entre un 'oui' et un 'oui si ' ? Cela change pas mal de choses…", relève Dominique Averty.
D'autres acteurs sont plus prudents. "Cela me paraît indispensable, mais nous n'avons pas encore de garantie de ce côté", observe Jimmy Losfeld, le président de la FAGE. "Sur le papier, il est bien prévu que les élèves aient cette information, mais les universités auront-elles toutes construit leurs parcours au moment de répondre aux lycéens ?", interroge également Stéphane Leymarie, secrétaire général du syndicat Sup-Recherche-UNSA.
Comment alors pourrez-vous faire votre choix ? "On n'est pas obligé de se cacher derrière Parcoursup. L'élève aura la possibilité de se rapprocher de l'établissement pour en savoir plus ou de consulter le site Internet de l'université", conseille François Germinet. Autrement dit, une démarche de plus à ajouter à votre liste déjà longue...