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Portrait

Basil, étudiant français à la Berklee College of Music à Boston : "Ma vie dans l’une des meilleures écoles de musique au monde"

Par Propos recueillis par Emmanuel Vaillant, publié le 30 juillet 2012
4 min

Installé dans le centre-ville de Boston, le Berklee College of Music est parmi les écoles de musique modernes les plus prestigieuses au monde, notamment dans l’univers du jazz et de la soul. De Quincy Jones à Diana Krall en passant par Brad Mehldau sans oublier notre Dédé national, alias André Manoukian, quelques stars y ont fait leurs gammes. En plus des cursus de pratique instrumentale, cette école privée qui compte 3.800 élèves de toutes nationalités est aussi réputée pour ses formations de compositeurs de musiques de films et de producteurs. C’est sur ce campus légendaire que nous avons rencontré Basil Al Bader, 29 ans, percussionniste, qui figure parmi la dizaine de Français à Berklee.
 


 

Comment êtes-vous rentré au Berklee College ?


J’ai découvert la batterie très tard, vers 18 ans. J’ai pris des cours au conservatoire municipal de Buc dans les Yvelines là où j’habitais. J’ai tout de suite été passionné. Je ne faisais que ça. A tel point que j’ai arrêté le lycée trois mois avant de passer le bac… J’ai alors été admis à l’American School of Modern Music à Paris où j’ai suivi pendant quatre ans un cursus en jazz performance. C’est là que j’ai passé une audition pour la Berklee qui recrute des musiciens du monde entier. L’épreuve de sélection consiste à jouer une composition et un arrangement d’un standard, plus des tests pour évaluer le niveau en rythmique et en harmonique. J’ai passé un entretien de motivation aussi. Je suis à Berklee depuis trois ans et j’entame ma dernière année pour décrocher un Bachelor degree of music en performance.

Au-delà du diplôme, quel intérêt de passer par cette école ?


D’abord, cette école permet d’accéder à des stars internationales du jazz : les saxophonistes Joe Lovano ou Dave Liebman, le pianiste Kenny Werner, la batteuse Terri Lyne Carrington ou le bassiste et contrebassiste John Patitucci… Tu vas à la FNAC, t’as quinze CD dans les bacs pour chacun de ces artistes, et là tu les retrouves devant toi comme profs… C’est juste énorme ! En sortant de cette école, tu bénéficies alors d’un net-working (ndlr : un réseau professionnel) fabuleux. Je connais maintenant des musiciens partout dans le monde.

Qu’est-ce qui change par rapport à l’enseignement de la musique en France ?


Ici, on te donne des outils, comme une palette à utiliser mais sans imposer des manières de faire. C’est à chacun d’inventer. Les profs sont des musiciens de renommée internationale, ils ont franchi des étapes, ils ont galéré… Ils savent, mais ils ne te disent pas "c’est comme ça qu’il faut jouer", ils te laissent inventer ton chemin. Je suis arrivé ici en pensant être un bon batteur. En fait, je me regardais jouer. Moins tu te regardes, mieux ça se passe. Quand j’ai vu le niveau de certains élèves ici, ça rend humble. La compétition entre les élèves est énorme, notamment pour les auditions. Mais il y a beaucoup de respect. On apprend les uns des autres. Moi, il a fallu que je travaille dur, des heures et des heures d’exercices pour augmenter mon potentiel en techniques, en arrangements, en harmonie, pour développer ma musicalité. Ici, on t’apprend à être bien dans ton boulot, à fond, sans se plaindre, à être positif et productif.


Est-ce qu’on peut dire qu’ici, être artiste, est un métier qui s’apprend ?


Oui. On apprend ici à avoir les bonnes attitudes pour gérer sa carrière. On apprend à se vendre, à se faire repérer, à trouver des concerts, à passer des auditions, à être là au bon moment, à monter des projets. A être polyvalent et à s’adapter aussi. Je peux jouer dans la plupart des registres musicaux. En sortant de cette école à la fin de l’année, je serais assez à l’aise pour me sentir prêt à être sur le marché.


Financièrement, comment ça se passe ?


Les frais de scolarité pour une année c’est 34.000 US$ (environ 27.000 €). Avec le coût de la vie sur place (logement, nourriture…) il faut compter environ 50.000 US$ (environ 40.000 €). Je bénéficie de bourses de l’école qui couvre environ 65% de la somme. Pour le reste (environ 25.000 €), je finance en donnant des cours de français, en accompagnant des classes, en plus du soutien de ma famille. Ici seuls quelques élèves hyper méritants qui ont le statut de "presidential" ne paient rien et sont même nourris et logés…

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