Jeunes diplômés handicapés : trouver du travail, mode d'emploi
Surmonter les préjugés, garder confiance en soi, apprivoiser le monde du travail... Pour un étudiant handicapé, l'insertion professionnelle est une course d'obstables. À l'occasion de la semaine pour l'emploi des handicapés (du 14 au 20 novembre 2016), on fait le point sur les dispositifs qui peuvent vous en faciliter l'accès.
Avec un handicap, comment accéder plus facilement à l'emploi ? Voici sept pistes à suivre.
1. Solliciter le service handicap de votre université
C'est le premier bon réflexe à avoir. "Les universités sont tenues de proposer, comme pour l'ensemble des étudiants, des mesures d'accompagnement professionnel des jeunes en situation de handicap", rappelle Zineb Rachedi, maître de conférences en sociologie à l'INS-HEA et directrice adjointe du Grhapes (Groupe de recherche sur le handicap, l’accessibilité et les pratiques éducatives et scolaires).
Le responsable accueil des étudiants handicapés de votre université est donc votre interlocuteur pour aplanir vos difficultés au quotidien. Au-delà des aides humaines et techniques, de l'aménagement de cursus et des conditions d'examens, il peut aussi vous accompagner vers votre entrée sur le marché du travail, en liaison avec le BAIP (bureau d'aide à l'insertion professionnelle). Pour trouver les coordonnées de ce responsable dans votre établissement, rendez-vous sur le site Handi-U.
2. Trouver des stages via l'Arpejeh
L'Arpejeh favorise l'employabilité des jeunes en situation de handicap en s'appuyant sur son réseau de 63 grandes entreprises. Cette association peut notamment vous aider dans la recherche de stages, depuis la classe de 3e jusqu'à bac+5. Elle propose également des visites d'entreprise, du tutorat et des ateliers de préparation professionnelle.
3. Trouver des offres d'emploi via l'Agefiph
L'Agefiph (Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées) propose des offres d'emploi (35.000 recensées début novembre 2016) sur son site Internet. Vous y découvrirez aussi l'actualité des secteurs et métiers qui recrutent actuellement des handicapés (assurance, habitat, environnement, transport-logistique...), ainsi que les entreprises qui s'engagent à en accueillir et auxquelles vous pouvez envoyer des candidatures spontanées.
Si vous ne trouvez pas votre bonheur, des offres d'emploi sont également mises en ligne sur le site Talent Handicap qui propose un forum de recrutement virtuel.
4. Se faire accompagner par un tuteur
"L'accompagnement permet à l'étudiant de devenir "expert" de son insertion professionnelle et de rassurer l'employeur potentiel, explique Franck Watier, le conseiller en prévention des risques professionnels à la mairie de Suresnes (92) et tuteur de jeunes étudiants en situation de handicap. L'objectif n'est pas de lui trouver un stage ou un emploi, mais de l'aider dans sa démarche et de lui donner confiance."
Demandez à un salarié en activité d'être votre tuteur pour vous aider dans votre recherche d'emploi : choix des entreprises, écriture de la lettre de motivation, préparation aux entretiens... Cela facilitera votre accès au monde de l'entreprise.
À savoir également : la loi Travail reconnaît aux personnes handicapées le droit à "bénéficier d'un dispositif d'emploi accompagné comportant un accompagnement médico-social et un soutien à l'insertion professionnelle". En attendant que les décrets d'application soient publiés et les financements disponibles, profitez des initiatives existantes : Ladapt, par exemple, une association reconnue d'utilité publique qui existe depuis 85 ans, propose des parrains aux personnes en situation de handicap dans leur vie quotidienne, y compris dans la recherche d'emploi. Contactez-la !
5. Explorer les possibilités du secteur public
Des conditions particulières d'accès à la fonction publique sont prévues pour les personnes handicapées. Par exemple, des aménagements sont possibles pour passer les concours administratifs (durée de l'épreuve, temps de repos entre deux épreuves, etc.). "Pensez aussi à explorer les villes qui ont signé la charte "Commune handicap" : elles s'engagent à faciliter l'emploi des personnes concernées", préconise Mahmoud Kékouche, responsable du service handicap et accessibilité à l'université Paris-Ouest-Nanterre.
6. Le secteur des entreprises adaptées
Ce type d'entreprises emploie majoritairement (80 % au moins) des travailleurs handicapés. Comme dans toute entreprise, vous signez un contrat de travail à durée indéterminée ou déterminée. Vous avez le statut de salarié et êtes soumis aux mêmes règles que les autres salariés. Vous touchez une rémunération au moins égale au SMIC (9,67 € brut de l'heure en 2016). En contrepartie, les entreprises adaptées touchent des subventions notamment pour l'adaptation du poste de travail. Pour connaître la liste des employeurs près de chez vous, contactez la MDPH (maison départementale des personnes handicapées) la plus proche de votre domicile.
7. Travailler dans des structures protégées
La nature de votre handicap ne vous permet peut-être pas de travailler dans le monde de l'entreprise "classique". Mais vous pouvez peut-être exercer une activité professionnelle dans un milieu protégé, un ESAT (établissement ou service d'aide par le travail) ou un CAT (centre d'aide par le travail). Vous bénéficiez alors d'un soutien médico-social et éducatif. Vous êtes rémunéré entre 55 et 110 % du SMIC soit entre 5,32 € et 10,64 € de l'heure. En cas de maladie, votre rémunération est maintenue pendant la durée d'indemnistation par l'Assurance maladie.
Marine, étudiante en master pro et malvoyante : "Je ne mendie pas un travail, j'apporte des compétences"
Marine, 23 ans, est étudiante en master pro humanités et management à l'université Paris-Ouest-Nanterre et malvoyante. Elle raconte comment se passent ses recherches de stage et d'emploi, avec l'aide de son tuteur.
Le handicap : faut-il en parler avec le recruteur ou pas ?
"Moi, je préfère en parler dès ma lettre de motivation, mais en une phrase seulement car l'entretien ne doit pas tourner uniquement autour du handicap. Et j'essaie de le transformer en quelque chose de positif : être malvoyante me permet d'avoir une approche différente du travail. Si le recruteur ne souhaite pas de personnes en situation de handicap, autant qu'il sache dès le début à qui il a affaire ! En entretien, de toute façon, cela va se voir. Je ne vais pas perdre mon temps avec quelqu'un qui a des préjugés sur mon handicap."
Dans votre recherche de stages ou de contrats, ressentez-vous de la discrimination à l'embauche ?
"Oui. Je déplore toutes les tactiques utilisées par les entreprises pour éviter de recruter une personne en situation de handicap sans encourir le risque d'être taxées de discrimination. J'en ai été victime par exemple lors d'un job d'été. Je postulais pour être guide dans les églises de Bretagne. J'avais obtenu mon attestation de guide. L'association qui recrutait m'a envoyé à la dernière minute un courriel m'avertissant que je risquais de glisser en cas d'humidité ou que je ne pourrais pas répondre à des questions de touristes sur les couleurs des vitraux. Bref, que je serai une contrainte supplémentaire pour les responsables. C'était clairement de la discrimination."
Vous vous faites accompagner pour votre insertion professionnelle. Quels sont les avantages du tutorat ?
"En licence, ma tutrice m'a aidée pour adapter mon CV, rédiger ma lettre de motivation, en particulier sur le fait d'aborder la question du handicap et comment en parler. Elle m'a aussi aidée à concrétiser mon projet professionnel. Je suis intéressée par une foule de choses, et c'est difficile de choisir... Elle m'a fait rencontrer des professionnels pour voir quels métiers m'étaient accessibles : scénariste de radio, administratrice de théâtre, etc."
L'obligation d'emploi, c'est quoi ?
Tout employeur occupant au moins 20 salariés est tenu d'employer des personnes en situation de handicap dans une proportion de 6 % de l'effectif total de son entreprise. L'obligation d'emploi concerne tous les salariés du secteur privé ou public, qu'ils soient en CDI, en CDD, en intérim, à temps complet ou non, en contrat d'apprentissage ou de professionnalisation.