Logement étudiant : le parcours du combattant
Chaque année, entre juin et septembre, c’est la course au logement pour des dizaines de milliers d’étudiants. Une quête semée d’embûches et qui nécessite souvent des sacrifices financiers car beaucoup de villes universitaires affichent des loyers particulièrement élevés.
"J'ai commencé à chercher un appartement en juin dernier, dès que les résultats d'APB (Admission postbac) sont tombés, et que j'ai su que j'étais pris à l'IAE de Créteil [94]. Durant ma semaine de révisions du bac, je regardais les annonces de studios sur des sites immobiliers comme Seloger.com et Pap.fr. J'ai vu des annonces qui m'intéressaient, mais elles étaient prises d'assaut et quelques heures suffisaient au propriétaire pour sélectionner son locataire ! Souvent, je n'avais même pas de réponses. En plus, je voulais faire les visites avec mes parents. À mon job étudiant en plein milieu de l'été, s'ajoutent mes vacances et celles de mes parents. Bref, ce n'est pas simple de fixer un rendez-vous !", soupirait, en juillet dernier, Nicolas, 18 ans.
À l'époque, ce bachelier, originaire de Pontarlier (25), envisageait déjà de squatter chez des amis installés dans la capitale à la rentrée, le temps de trouver une solution. Pour lui, comme pour la plupart des étudiants, la quête d'un toit relève bien souvent de la course d'obstacles. Surveillance fiévreuse des sites d'annonces immobilières, assaut d'amabilités auprès des propriétaires lors des visites pour se distinguer des autres candidats patientant dans l'escalier, course aux documents pour satisfaire aux demandes souvent excessives de ces mêmes propriétaires... Entre juin et septembre, c'est le lot de tous ceux qui cherchent à se loger le temps de leurs études.
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170.000 places au CROUS pour 350.000 demandes
Première option, du moins pour les boursiers, les chambres et les studios des résidences universitaires gérées par les CROUS (centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires). "Nous disposons de 170.000 places dans toute la France, pour environ 350.000 demandes. Mais il existe des disparités d'une ville à l'autre : en fonction des agglomérations, il y a entre deux et neuf demandes pour une place", explique Olivier Bardon, sous-directeur à la vie étudiante au CNOUS (Centre national des œuvres universitaires et scolaires).
Ainsi, si à Paris, les 6.600 places s'avèrent très insuffisantes, ailleurs les chances de voir votre demande aboutir sont nettement plus élevées. Comme en Lorraine qui compte environ 76.000 étudiants. "L'accès à nos 19 résidences universitaires, dont 13 sur l'agglomération de Nancy, s'effectue sur critères sociaux prioritairement, mais nous arrivons aussi à offrir des places à des étudiants qui sont non boursiers", assure Jean-François Tritz, responsable du pôle communication, culture et animation du CROUS Lorraine.
40.000 logements d'ici à la fin 2017
Pour remédier au déficit de logements étudiants, au début du mandat de François Hollande, le gouvernement avait lancé le "Plan 40.000". Objectif : construire, d'ici à la fin du quinquennat de l'actuel président de la République, 40.000 logements supplémentaires, dont la moitié gérée par les CROUS et l'autre par des bailleurs sociaux, afin d'augmenter de 25 % les capacités d'accueil. "Avec une priorité donnée aux zones sous-dotées. La moitié de ces constructions étaient d'ailleurs prévues en Île-de-France", précise Olivier Bardon.
Malgré la difficulté à trouver des terrains à bâtir proches des transports en commun (à défaut d'être près des établissements), entre 2013 et 2015, un peu plus de 20.000 nouveaux logements sont sortis de terre. Et les chantiers en cours devraient permettre de dépasser les 40.000 d'ici à la fin 2017. Un sacré bol d'air... d'autant que les prix pratiqués sont imbattables : de 220 € pour un chambre à 400 € environ pour un grand studio avant déduction de l'APL (aide personnalisée au logement).
Pour faciliter l'accès au logement des étudiants dépourvus de garants familiaux, les CROUS proposent également la CLE (caution locative étudiante). En clair, c'est l'État qui se porte caution en lieu et place des parents. "Mais les propriétaires restent réticents et privilégient les cautions parentales", regrette Mélanie Vasselin, responsable de la commission aides sociales à l'UNEF (Union nationale des étudiants de France).
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800 € par mois pour un studio à Paris
Le montant du loyer ? La question est loin d'être secondaire. "Pour la majorité des étudiants, c'est le premier poste de dépenses. Il représente en moyenne 55 % de leur budget total", relève Mélanie Vasselin. Selon le classement des villes en fonction du coût de la vie étudiante, publié en septembre dernier par l'UNEF, cette proportion peut atteindre les trois quarts du budget moyen dans certaines villes !
Les prix ? Selon une enquête réalisée en juin 2016 par Locservice.fr, site Internet de location entre particuliers, une chambre étudiante se loue en moyenne 383 € pour une surface de 14 m2 et 477 € pour un studio. Mais ce n'est qu'une moyenne...
À Paris, toujours selon Locservice.fr, pour un studio, il faut débourser en moyenne 806 € par mois, et même au-delà dans certains quartiers chics, comme le VIIe ou le XVIe arrondissement.
1.000 logements étudiants prévus à Paris
Des sommes astronomiques qui n'étonnent pas Nicolas, le bachelier de Pontarlier, qui durant le mois d'août, a fini par signer un bail pour un mini-studio de 11 m2 dans le XIIe arrondissement pour un loyer de 550 €. "Il y a une pénurie générale, c'est donc encore plus difficile pour les étudiants", reconnaît Ian Brossat, adjoint à la mairie de Paris, en charge du logement et de l'hébergement. Afin d'améliorer la situation, la ville s'est engagée à construire 10.000 logements par an, dont 1.000 spécifiquement dédiés aux étudiants, notamment par le biais de reconversion de bureaux en logements et du réaménagement de friches industrielles.
Des événements ont lieu pour permettre aux étudiants de trouver un logement à Paris : ici, le Café Coloc, organisé par le CROUS, dans le cadre du Rendez-vous étudiant pour la rentrée 2016. // © Julie Balagué pour l'Étudiant
"Nous encourageons également le développement de la colocation dans les HLM", complète Ian Brossat. À l'image de CoopColoc, lancé en 2014 par la coopérative Solidarité étudiante. "Il s'agit de proposer des colocations dans des grands appartements pour lesquels les bailleurs sociaux franciliens ont du mal à trouver preneurs, explique Laurent Perl, chargé de développement du projet au sein de Solidarité étudiante. C'est un dispositif qui s'adresse aux étudiants dont les parents ont des ressources éligibles au logement social." Pour l'heure, CoopColoc dispose de 40 places, bien insuffisantes pour satisfaire la dizaine de candidatures reçues chaque jour en "période de pointe". "Mais l'offre va se développer au rythme de 20 à 30 places supplémentaires par an", promet Laurent Perl.
Si Paris atteint des sommets en termes de loyer, la flambée des prix semble cependant être contenue grâce à l'encadrement des loyers. En 2015, 30 % des nouveaux "emménagés" ont ainsi bénéficié d'un loyer revu à la baisse. "La mesure a surtout eu un effet modérateur sur les petites surfaces", note Mélanie Vasselin de l'UNEF. Reste que beaucoup de propriétaires ne respectent pas encore cette nouvelle législation. Pour être sûr d'avoir un loyer dans les clous, le ministère du Logement vient d'ailleurs de lancer le site encadrementdesloyers.gouv.fr. À consulter une fois son contrat de bail signé...
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508 € par mois pour un studio de 20 m2, à Bordeaux
Si l'Île-de-France concentre la plupart des difficultés, certaines villes de province se distinguent également par des loyers élevés. L'étude de Locservice.fr pointe Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nice et Villeurbanne. Il faut ainsi débourser, chaque mois, 571 € pour un studio à Nice et 508 € à Bordeaux.
Parmi les villes où la modération est de mise, figurent Besançon, Brest, Limoges, Le Mans ou encore Poitiers. "Je partage un trois-pièces de 70 m2 lumineux, à quinze minutes à pied du centre. Le tout pour un loyer total de 510 €. En prime, en négociant, nous avons même réussi à faire baisser les frais d'agence de 30 %", raconte ainsi Hélène, 26 ans, en formation d'assistante sociale à l'IRTS (institut régional du travail social) de Besançon. Elle avoue tout de même avoir passé beaucoup de temps à chercher avant de trouver la perle rare.
Prendre son temps et surtout s'y prendre à temps, mais aussi frapper à toutes les portes, faire appel à son réseau, c'est sans doute la meilleure méthode pour parvenir à trouver un chez-soi décent pour ne pas se stresser inutilement. Sans oublier de faire preuve de curiosité, car il existe de nombreux bons plans qui permettent de s'éloigner des sentiers battus. Et de multiplier ses chances de trouver un toit sans être obligé de se ruiner.
Lucas, 18 ans, en première année à Toulouse Business School : "J'ai effectué toutes mes démarches par Internet"
"À la fin de mon année scolaire à Strasbourg, lorsque je me suis inscrit à Toulouse Business School, j'ai été informé que l'école avait un partenariat avec le site Studapart. En le visitant, j'ai vu que les offres de studios en résidence étaient nombreuses à Toulouse, je ne me suis donc pas trop stressé et je suis parti en vacances avant de commencer à chercher sérieusement la première semaine d'août, en m'inscrivant sur le site.
Ce qui est pratique, c'est qu'il est possible de créer un dossier de candidature, d'effectuer toutes les démarches à distance et de postuler pour plusieurs logements simultanément. Autre intérêt, il n'est donc pas nécessaire de se déplacer. Toutes les résidences se ressemblant, je ne voyais pas l'intérêt d'aller sur place pour une visite ! J'ai envoyé plusieurs dossiers de candidature et j'ai très vite reçu une réponse positive. J'ai découvert que, dans ce cas-là, il fallait être réactif : comme plusieurs candidats sont acceptés pour un même logement, c'est celui qui effectue, le premier, le virement du versement de garantie et du premier loyer qui l'emporte. Heureusement, j'ai été le plus rapide !"