DAEU : l’autre voie d'accès vers l’enseignement supérieur
Proposé dans la plupart des facs, le DAEU (diplôme d'accès aux études universitaires) permet à des non-bacheliers de renouer avec les études et de rouvrir le champ des possibles. Explications.
"Au lycée, alors que je préparais un BEP (brevet d'études professionnelles) sanitaire et social, j’ai dû interrompre mes études pour des raisons de santé. Quand mon état s’est arrangé, j’ai finalement décidé de me lancer directement sur le marché du travail. Dans l’ignorance de la jeunesse, je pensais que les diplômes n’étaient pas forcément indispensables", raconte Laureline. Pendant huit ans, la jeune femme a multiplié les missions dans la vente, la restauration ou l’accueil, sans jamais vraiment trouver sa voie.
À Pôle emploi, pour évoluer, on ne lui proposait que des validations d’acquis en secrétariat, un domaine qui ne lui plaisait pas, ou des formations redondantes avec ce qu’elle savait déjà. Jusqu’à ce qu’elle découvre par le bouche-à-oreille le DAEU (diplôme d’accès aux études universitaires).
"Une toute nouvelle route"
Proposé dans la quasi-totalité des facs de l’Hexagone, ce titre de niveau IV donne les mêmes droits que le baccalauréat. En 2015, Laureline s’est donc inscrite à l’université de Cergy-Pontoise pour le préparer, et le passer avec succès. Aujourd’hui, inscrite en sciences humaines, en deuxième année de licence, elle voit son avenir sous un jour complètement différent.
Un moyen de reprendre des études...
Comme Laureline, de 5.000 à 6.000 adultes prennent chaque année un nouveau départ grâce au DAEU en France. Grâce à ce sésame, décliné en deux mentions – "littéraire" (DAEU A) et "scientifique" (DAEU B) – certains pourront progresser dans leur entreprise, beaucoup vont reprendre des études en licence, en BTS (brevet de technicien supérieur) ou en DUT (diplôme universitaire de technologie). D’autres encore passeront les concours de la fonction publique ou du secteur paramédical. Des horizons jusque-là hors de portée de ces personnes "qui ont souvent quitté le système scolaire avec un sentiment d’échec très fort", note Gaëtane Popesco, responsable du DAEU de Cergy-Pontoise.
Parmi ses dernières promotions, 60 % des recrues avaient entre 20 et 25 ans, 30 % entre 25 et 40 ans. Si l’âge minimum d’accès est fixé à 24 ans, le DAEU s’ouvre en effet dès 20 ans aux jeunes affichant deux années d’expérience professionnelle. "La plupart se sont arrêtés au moment du brevet ou en classe de seconde. Soit ils ne se sentaient pas à leur place en lycée professionnel ou en apprentissage, soit ils n’ont pas pu intégrer la filière générale de leur choix", poursuit Gaëtane Popesco.
... et de retrouver confiance en soi
Face à des histoires personnelles compliquées, les enseignants n’ont qu’un leitmotiv : "leur redonner confiance". Bien sûr, le programme est exigeant, puisqu’il s’agit de "rattraper en un an les trois ans de lycée", comme le souligne Elsa Bonnefoi, responsable du DAEU de l’université d’Angers. Mais "l’état d’esprit n’a rien à voir avec le cadre scolaire, ajoute Gaëtane Popesco. On propose aux élèves un certain nombre de travaux à faire en dehors des cours, mais il n’y a pas d’obligation à rendre ces exercices. Chacun s’organise comme il le peut et les professeurs restent disponibles en cas de besoin".
Un dialogue qui se met en place avant le début des études proprement dites : "On reçoit tous les élèves en entretien individuel pendant une demi-heure. C’est une étape fondamentale pour comprendre leurs objectifs, leurs besoins et poser les bases d’un accompagnement pertinent", estime Patrick Courtin, coresponsable du DAEU de Paris Ouest-Nanterre.
Des cours à la carte
À partir de ce premier contact, chacun pourra se composer un emploi du temps sur mesure. Dans chaque série, à côté des matières obligatoires – français et langue étrangère en DAEU A, français et maths en DAEU B – il faut en effet choisir deux options : histoire, géographie, deuxième langue, physique, économie ou encore sciences de la vie. Puis les universités favorisent la conciliation entre vie professionnelle et reprise d’études en proposant des cours du soir, ou, parfois des modules en ligne. Certaines, comme Paris Ouest-Nanterre, prévoient en prime des séances de soutien : ateliers d’écriture, de grammaire, etc.
Acquérir des méthodes de travail
Dans tous les cas, l’accent est mis sur la méthode : "Au-delà des connaissances, c’est ce qui fait souvent défaut aux étudiants. Dès les premiers cours, on s’attache donc à voir comment construire une argumentation", précise Patrick Courtin. Dans le DAEU d’Angers est même inclus un gros module de méthodologie pour remettre à plat toutes les questions générales. "On leur présente les outils à leur disposition, sur Internet ou en bibliothèque, on les aide à repérer leur manière de mémoriser des connaissances à travers des exercices, à travailler en groupe ou mettre à profit les corrections d’une copie", détaille Elsa Bonnefoi.
Bref, le DAEU privilégie une certaine souplesse. À noter : les modules sont capitalisables, ce qui permet d’échelonner leur préparation sur quatre ans. Reste à ne pas négliger l’investissement requis. "Chaque semaine, il faut compter une dizaine d’heures de cours et donc autant de révisions personnelles, c’est un sacrifice de temps énorme", rappelle Elsa Bonnefoi. "Avant de s’inscrire, il s’agit d’évaluer les efforts nécessaires et la marge de manœuvre dont on dispose dans son planning. Puis voir quelle est la plus-value du DAEU, renchérit Gaëtane Popesco. Car ceux qui réussissent sont ceux qui y voient un tremplin pour leur projet personnel". La motivation donne des ailes !