Cyberharcèlement : comment réagir ?
Insultes, rumeurs, vol de profils, photos détournées… les “débordements” sur les réseaux sociaux sont fréquents. Leurs effets dévastateurs. Comment éviter d’être harcelé sur le Web ? Que faire si vous êtes cyber-harcelé ? Nos conseils pour éviter que vos échanges virtuels ne virent au cauchemar.
Le cyber harcèlement, c’est quoi exactement
Création d’un faux profil à votre nom, messages d’insultes, diffusion de rumeurs, incitations au suicide, mise en ligne de photos ou de vidéos gênantes… les formes de cyberharcèlement sont nombreuses. Il existerait même des “modes” en la matière. À en croire Laurence Ripoche, principale adjointe à Alfortville, le vol de profil et les classements arriveraient en tête des pratiques les plus prisées des collégiens harceleurs : beau/laid, mince/gros, soins/tshoins… Malheur à celui qui se retrouve du mauvais côté.
“À un âge où les jeunes ont le souci de plaire, ces pratiques sont particulièrement destructrices. Elles laissent des traces indélébiles”, analyse Bertrand Gardette, CPE et auteur de “Prévenir le harcèlement à l’école”. Et Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance, d’expliquer : “Répéter à quelqu’un tous les jours qu’il est gros, laid, con et qu’il ne mérite pas de vivre, ce n’est rien d’autre que de l’incitation au suicide.”
Présent sur les réseaux sociaux, oui, mais avec vigilance
Pour éviter de s’exposer à de telles dérives, suffit-il de ne pas être sur les réseaux sociaux ? Ce n’est pas parce que personne n’est véritablement à l’abri du cyberharcèlement qu’il faut pour autant renoncer à toute relation amicale sur Internet. “Ce qu’il faut, c’est éviter de trop s’exposer”, prévient Justine Atlan. Ne communiquez jamais votre mot de passe, même à votre meilleur ami. Pensez également à déconnecter votre compte Facebook ou votre boîte mail en toute circonstance.
Une précaution que Louise, 15 ans, n’a pas cru bon de prendre : “J’ai laissé ma session Facebook ouverte sur l’ordinateur du collège, quelqu’un en a profité pour changer mon mot de passe. Il a fait des propositions sexuelles à la moitié des garçons du collège en se faisant passer pour moi. La honte suprême !” lâche la jeune fille, encore très marquée par l’épisode.
Pensez aux traces que vous laissez malgré vous
Évitez également de vous laisser photographier dans des postures peu flatteuses ou de poster des photos sur lesquelles vous n’êtes pas à votre avantage, au risque de les retrouver sur la Toile avec des commentaires désagréables. Méfiez-vous aussi des échanges par webcam, rien ne vous garantit que votre interlocuteur ne les enregistre pas.
“Le problème sur le Net, c’est que tout peut ressurgir à n’importe quel moment et être utilisé contre [vous]” prévient la directrice de l’association e-Enfance. Vos amis d’aujourd’hui peuvent se révéler moins bienveillants après une dispute. Un amoureux éconduit peut avoir envie de se venger. Internet agit comme une caisse de résonance. “La moindre petite brouille prend, en quelques clics, une ampleur délirante”, commente Madeleine, en 3e.
Ne pas se taire, ni s’isoler
Si, malgré vos précautions, vous êtes victime (ou témoin) d’insultes ou de fausses rumeurs sur Internet, dites-le ! “Plus de huit jeunes sur dix qui ont connaissance de phénomènes de harcèlement se taisent. Parce qu’ils n’ont pas conscience de la gravité de la chose ou parce qu’ils craignent de passer pour des balances, analyse Justine Atlan. Or, dénoncer ces faits reste le meilleur moyen de mettre fin au cyberharcèlement.”
Parlez-en à des adultes au collège ou à vos parents. Vous pouvez également contacter une association. Au 0.800.200.222, l’association e-Enfance recueille les plaintes et témoignages. Pas besoin d’être victime pour téléphoner. La ligne est ouverte à tout le monde, y compris aux témoins. Vous pouvez également vous rendre sur le site de netecoute.com et y laisser un message mail ou tchater avec un conseiller. Peu importe le moyen, l’essentiel est que vous parliez.
Il est important que vous ne restiez pas seul avec votre problème. “Les victimes doivent savoir qu’il est possible de mettre fin à la maltraitance sur Internet et de supprimer les contenus harcelants”, insiste la directrice de l’association e-Enfance.
Le Net n’est pas une zone de non-droit
En cas de harcèlement sur les réseaux sociaux, faites des captures d’écran et signalez votre compte. Si, malgré tout, le harcèlement dure, on peut demander aux réseaux sociaux de supprimer le profil de la personne qui a harcelé. Et, quand les choses sont allées vraiment trop loin, il ne faut pas hésiter à porter plainte.
“Le harcèlement n’est pas permis par la loi. Il faut cesser de croire que le Net est une zone de non-droit”, insiste Justine Atlan. “Et à tous ceux qui sont témoins de cyberharcèlement, il est de leur devoir de le dire, assène Laurence Ripoche. Une blague qui ne fait pas rire celui qui en est au centre n’est pas une blague.” Soyez vigilants !
Une pétition pour dire stop au cyberharcèlement
Pour faire stopper le cyberharcèlement, le BICE (Bureau international catholique de l'enfance), une ONG (organisation non gouvernementale) internationale, en partenariat avec l’association e-Enfance et deux syndicats lycéens (l’UNL et le SGL), propose aux jeunes à partir de 13 ans de signer une pétition qui sera portée en septembre 2014 au Comité des droits de l'enfant de l'ONU (Organisation des nations unies).
L’objectif : vous sensibiliser à la question du cyberharcèlement. Par votre signature, vous ne vous engagez pas seulement à ne pas poster de commentaires, photos ou vidéos contre la volonté de celui qui en est l’objet et à ne pas partager de tels commentaires. Vous devez également veiller, dans la limite de vos moyens, à dissuader les autres d’actes de harcèlement. À vos stylos !
Combien de jeunes cyber-harcelés ?
D’après une enquête réalisée par le réseau scientifique européen Eu Kids Online et financée par le programme de la Commission européenne Safer Internet, auprès d’un échantillon aléatoire de 25.142 enfants âgés de 9 à 16 ans, en France, en 2012, 26 % des jeunes ont déclaré avoir été harcelés au cours de l’année précédant l’enquête. 5 % l’ont été en ligne.
Les filles sont plus souvent victimes de harcèlement que les garçons. Entre 9 et 12 ans, elles sont trois fois plus souvent dans ce cas et quatre fois plus entre 15 et 16 ans. 17 % des jeunes interrogés avouent avoir déjà harcelé quelqu'un.