Il a remporté le prix Reporters d'Espoirs Radio
À 27 ans, Côme Bastin a remporté, lundi 12 octobre 2015, le prix Reporters d'Espoirs Radio, pour ses chroniques dans "Le futur c'est maintenant", sur Radio Nova. Ex-ado intello et solitaire, il s'est ouvert au journalisme à la rédaction d'"Alternatives économiques". Et son envie de radio est née lorsqu'il travaillait pour le magazine "We Demain". Rencontre.
"Je ne comprends pas le débat autour du journalisme de solutions, qui déformerait la réalité. En parlant des solutions, je n'occulte pas les problèmes de société, je traite des solutions apportées à ces problèmes", a revendiqué Côme Bastin, en recevant le prix Reporters d'Espoirs Radio 2015, le 12 octobre, pour ses chroniques sur Radio Nova.
De "We Demain" à la radio
L'envie de faire de la radio lui est venue en travaillant à la rédaction de We Demain, revue trimestrielle centrée sur "les initiatives technologiques, économiques, énergétiques, médicales, alimentaires et artistiques qui réinventent le monde". À force d'écrire des chroniques que le directeur du magazine portent de sa voix sur France Info, il a le déclic. "Je me suis tourné vers Radio Nova que j'écoute pas mal", raconte-t-il.
Côme contacte alors Marie Misset, animatrice de "2 heures et quart avant la fin du monde", émission en phase avec les problématiques dont s'occupe alors le jeune homme. Ses idées la séduisent, mais tous les postes de chroniqueurs étaient pourvus. "Elle m'a rappelé parce qu'un de ses chroniqueurs était parti à Berlin et j'ai commencé la semaine suivante." Depuis 1 an, le journaliste intervient chaque semaine sur cette station.
"Intello et solitaire"
Quand il ne parle pas dans le micro, Côme pige toujours pour "We Demain" et Socialter, "la même philosophie", résume-t-il. Il a également participé au Positive Book, un ouvrage proposant des portraits de "pionniers de l'économie positive". Et il s'apprête à dresser des "portraits de pionniers dans le domaine de la santé pour Ashoka", le réseau mondial d'entrepreneurs sociaux.
Avant de trouver cette philosophie qui lui va bien, Côme était plutôt destiné à un avenir universitaire, en philosophie, justement. "Intello", "décalé", "plutôt solitaire ", il comptait davantage de bonnes notes que de copains au collège et au lycée.
Sans surprise, il effectue 2 années de prépa littéraire et enchaîne jusqu'au master 1 de philosophie à la Sorbonne, qu'il décroche en 2010. Il entreprend alors un master 2 en sociologie et statistiques, à l'EHESS. Étrangement, c'est son mémoire sur les indicateurs de richesse alternatifs au PIB (produit intérieur brut) qui le mènent au journalisme. Côme ne parvient pas à trouver la motivation pour l'écrire à la bibliothèque et le journalisme l'attire.
"Aller contre soi"
Il propose alors un deal assez surprenant au rédacteur en chef d'"Alternatives économiques". "Je lui ai parlé de mon blocage et lui ai proposé de leur faire des papiers pas chers sur mon sujet pour avancer dans mon mémoire." Sa démarche étonne et séduit.
"En stage à la rédaction pendant plus de 5 mois, en 2011, j'ai aimé la sensation d'être au prise avec le monde quand j'interviewais des gens." L'ex-collégien solitaire s'est découvert une grande sociabilité au contact des gens passionnants qu'il a rencontrés. L'apprenti-journaliste trouve "intéressant d'aller contre soi, contre ses premières inclinaisons et de se faire un peu violence.
Détour par la com'
À 23 ans, principe de réalité oblige, il décroche un job de communicant. "J'ai passé 1 an à gagner pas mal d'argent, entre ce boulot, des cours particuliers de philo et la correction de copies. Mais quand on m'a proposé un CDI dans la com', j'ai repris conscience que ma préférence allait clairement vers le journalisme."
Côme entre alors au Celsa, en M2 recherche en sciences de la communication et de l'information.
Retour au journalisme chez StreetPress
Il pige ensuite pour StreetPress, où il se lance dans une série de reportages sur "des petites gens dans Paris, comme les rabatteurs pour coiffeurs afros à Strasbourg-Saint-Denis". Le média lance alors sa Street School pour former 15 jeunes de 20 à 30 ans qui souhaitent devenir journalistes mais n'ont pas fait d'école. Côme y passe 3 mois, au printemps 2013.
"C'était très pratique. On avait des cours de photos, des reportages et autres à rendre régulièrement et on tenait un canard avec des papiers sur lequel on partait le matin pour les boucler le jour même", se souvient-il.
Rencontre avec l'écosystème de l'innovation chez "We Demain"
Tout s'enchaine ensuite très vite. "We Demain" cherche un stagiaire. L'intello devenu journaliste l'achète et s'y retrouve : "Il y avait à la fois du reportage et une dimension prospective."
En stage dès juillet 2013, puis chargé du site Web du magazine, Côme y trouve sa place. "C'est là que j'ai rencontré l'écosystème de l'innovation, mon réseau." Il refuse toutefois un CDI pour satisfaire ses envies de sujets longs. "J'ai fait un long format pour RFI en Inde sur une association qui forme les gens les plus pauvres à produire de petits reportages pour montrer ce qu'ils vivent."
Un choix que le lauréat du prix Reporters d'Espoirs ne regrette pas, même s'il reconnaît avoir "parfois dû faire des trucs alimentaires en presse professionnelle, mais rien de très honteux".
Envie d'Inde et de radio
"Aujourd'hui, il y a plein de gens qui font des trucs moins intéressants pour pouvoir faire des sujets qui leur tiennent vraiment à cœur, estime le jeune homme. Ce n'est pas la faute des journalistes. Le modèle économique de la presse a volé en éclat. Il va falloir en trouver d'autres. Et, à mon avis, il y en aura autant que de projets éditoriaux."
En attendant, Côme invente son modèle économique, entre la radio et le reportage, entre la France et l'Inde, où il retourne fin décembre. "J'adore ce pays. Je déteste l'hiver à Paris. Et, en termes de journalisme de solutions, il y a beaucoup à faire parce qu'il y a plein de problèmes là-bas et beaucoup de gens qui se bougent. Ce pays émergent me passionne et mérite qu'on parle de lui autrement que par les viols." Son idéal ? "3 mois en Inde, le reste à Paris, et davantage de radio." Son prix Reporters d'Espoirs pourrait bien contribuer à lui donner cette liberté.