Les 20 ans d'Anne-Sophie Lapix : "J'avais des vrais parents des années 1970, assez cool"
Après le bac, Anne-Sophie Lapix a choisi l’IEP de Bordeaux comme tremplin pour intégrer le Centre de formation des journalistes à Paris. Cette bosseuse, qui reconnaît n’avoir jamais laissé passer une opportunité, va présenter "C à vous" sur France 5 à la rentrée 2013.
Quel souvenir gardez-vous de vos années lycée à Saint-Jean-de-Luz?
La famille de mon père était catholique. J'ai donc fait ma scolarité à Saint-Thomas-d'Aquin dans ma ville natale : Saint-Jean-de-Luz (64). Le lycée avait très bonne réputation, il faisait partie de ceux qui amenaient le plus d'enfants de la sixième jusqu'au bac.
Mais l'ambiance était assez détendue et festive. Il faut dire que la scolarité là-bas, c'est le bonheur : nature, sport, devoirs sur la plage... De certaines classes, on voyait la mer. D'ailleurs, beaucoup de surfers, plus fixés sur les vagues que sur le tableau, ont fait une scolarité moyenne.
Vous étiez plutôt une bonne élève ?
Sans être une grande travailleuse, j'ai fait ce qu'il fallait pour avoir un bac C [bac S actuel, NDLR]. Je pensais que c'était mieux, même si je savais que je suivrais des études littéraires. Aujourd'hui, j'avoue ma déception de ne pas avoir eu de mention, alors que j'avais eu de bonnes notes toute l'année.
Vos parents ont-ils influencé vos choix d'études ?
Faire des études était normal pour mes parents qui en avaient fait. Mais ils ne nous ont jamais mis la pression. J'avais des vrais parents des années 1970, assez cool, qui ne s'occupaient pas de nos devoirs. Comme ils avaient confiance en notre capacité à trouver la voie qui nous plairait, nous avions l'idée que nos choix étaient les bons. Ma sœur, qui est aujourd'hui prof de musique, jouait du piano cinq heures par jour, parce qu'elle aimait ça. Nous avions une grande liberté, mais ne faisions pas beaucoup de bêtises pour autant.
Quand avez-vous su que vous vouliez devenir journaliste ?
Très tôt ! À la base, j'étais curieuse, j'aimais écrire, j'avais envie de rencontrer des gens et de leur poser des questions... En CM2, nous avions un petit journal avec des copines. C'était nullissime mais rigolo! Je faisais les photocopies chez mon père, entrepreneur dans le bâtiment, et nous vendions le journal à la criée. Avec les bénéfices, nous allions manger des viennoiseries fabuleuses. Au collège, j'ai feuilleté un dossier sur le journalisme et lu que le meilleur moyen de parvenir à mon but était l'IEP [institut d'études politiques, NDLR]. Quand j'ai passé le concours à Bordeaux, je visais déjà le CFJ [Centre de formation des journalistes, NDLR].
Étiez-vous indépendante pendant vos études ?
J'avais un studio avec ma sœur, qui a un an de plus que moi et qui faisait des études de musicologie. Au niveau financier, j'étais l'élément raisonnable. Je donnais des "cours de courses" à ma sœur, beaucoup plus riche que moi grâce aux leçons de piano qu'elle donnait. À l'époque, j'achetais les promos et je pouvais dire au franc près combien j'allais payer avant de passer en caisse ! Côté fête, c'était plutôt moi qui entraînait ma sœur. En musicologie, il n'y avait pas du tout l'ambiance potache de l'IEP. J'ai toujours des amis de l'époque, qui ont suivi la même voie que la mienne. Ces années ont été fabuleuses.
Avant le CFJ, vous avez passé une année en Angleterre...
Il y avait un contrat entre Sciences po Bordeaux et l'université de Bristol, en Angleterre. Je suis donc partie en année Erasmus en politics. Ce qui était déstabilisant, mais intéressant, c'est que la participation en cours était très importante. Alors qu'en France, on a toujours peur de dire une bêtise, ce n'était pas un problème là-bas. J'ai aussi joué dans des comédies musicales, sur un malentendu... Je pensais m'inscrire pour assister à des spectacles et, en fait, c'était pour participer à des auditions ! Cette année-là, j'ai préparé le concours du CFJ en écoutant les radios françaises.
Aviez-vous un plan B si vous ratiez le concours ?
C'était mon seul objectif, et je me suis un peu jetée dans le vide... Si je n'avais pas eu le concours, j'aurais été embêtée. Mais je pense que j'aurais fini par trouver un autre moyen. Il n'est pas nécessaire de faire une école pour devenir journaliste, même si cela vous prépare bien au métier et vous simplifie les choses. Heureusement, j'ai été reçue à l'École supérieure de journalisme de Lille et au CFJ de Paris. J'ai choisi Paris, parce que ce n'était pas l'inconnu. Ma mère étant parisienne, la moitié de ma famille y vivait.
Vous souvenez-vous de votre premier passage à l'antenne ?
C'était début 1996, nous étions partis trois semaines à TV8 Mont-Blanc à Annecy [74] avec le CFJ. Chose incroyable, le présentateur ne s'est pas réveillé ! Trois heures avant le JT, le directeur de la rédaction m'a dit : "Tu vas le présenter." Je n'étais ni coiffée ni habillée comme il fallait, et je ressemblais à un hamster avec mes bonnes joues d'ado. J'espère que ces images disparaîtront à jamais !
Ce premier JT a-t-il été une révélation ?
Pas du tout ! Ce n'est qu'après un stage d'été à France 3 Champagne-Ardenne – où tout le monde avait demandé sa mutation – que j'ai passé un test à Bloomberg TV, qui se créait. Cette chaîne était associée à l'AFP [Agence France Presse, NDLR], ce qui me donnait l'assurance d'être rapidement en CDI [contrat à durée indéterminée, NDLR]. Aujourd'hui encore, je négocie toujours ce type de contrat. J'ai toujours très peur de ne pas avoir de travail. Lorsque j'étais étudiante, j'économisais ma bourse pour éviter une situation difficile après mes études.
C'est donc plus l'envie de CDI que celle de "faire de la télé" qui vous y a menée...
Je suis d'abord journaliste, passionnée par les news, et "passer à la télé" n'a jamais été ma motivation principale. Initialement, je voulais être reporter en presse écrite, mais j'aurais aussi bien pu faire de la radio. Lorsque j'ai été recrutée à LCI par Jean-Claude Dassier, mon mentor, après Bloomberg TV, j'ai compris que la présentation de journaux à la télé allait durer...
A-t-il été difficile de passer de la présentation de l'info à l'interview ?
Je pense avoir de la chance. Je n'ai jamais provoqué les choses, mais je n'ai jamais laissé passer une opportunité. Quand je change de poste, je me demande si je suis vraiment la bonne personne et j'ai toujours l'impression de me lancer dans l'inconnu. Il me semble que sans cette critique permanente, on n'avance pas.
Le prix du "meilleur interviewer 2012" vous a-t-il un peu rassurée ?
Cela fait plaisir et vous sort un peu de votre doute. Quand vous venez de la présentation de l'info, il y a toujours le cliché de "la Barbie qui passe bien et lit son prompteur". Je ne m'en suis jamais vexée, parce que j'ai toujours fait des choses intéressantes et progressé. Et comme je fais Dimanche + depuis cinq ans et que j'ai atteint 40 ans, on m'a un peu sortie de ce registre-là !
Il est difficile de trouver un emploi de journaliste aujourd'hui. Que conseillez-vous aux jeunes qui souhaitent le devenir ?
C'est compliqué partout. Il ne faut donc pas se restreindre mais aller vers ce qui nous motive, nous passionne, et croire en sa bonne étoile. Les rencontres comptent aussi dans le journalisme. Je leur conseillerais plutôt de faire des études assez ouvertes – histoire, hypokhâgne... –, puis une formation très technique en journalisme.
Et si c'était à refaire...
Je regarde plutôt en avant qu'en arrière... Sans doute que je n'irais pas en série scientifique au lycée, pour passer plus de temps à étudier ce qui m'intéresse.
Biographie express
1972 : naissance le 29 avril 1972 à Saint-Jean-de-Luz (64).
1990 : institut d'études politiques de Bordeaux après un bac C (bac S actuel).
1996 : diplôme du Centre de formation des journalistes, à Paris.
1996 : premier CDI de journaliste en tant que présentatrice du journal d'information sur Bloomberg TV-AFP.
1999 : sur LCI pour présenter le journal.2005 : sur M6 pour la présentation du magazine d'actualité Zone interdite.
2006 : devient le joker de Claire Chazal pour les journaux télévisés du week-end sur TF1.
2008 : en septembre, prend les rênes de l'émission politique Dimanche + sur Canal +.
Et si c'était à refaire ?
Anne-Sophie Lapix a passé le T.O.P, le test d'orientation de l'Etudiant. Était-il logique qu'elle se tourne vers le journalisme ?
Son bilan T.O.P
Un profil "Investigateur" tendance "Réaliste Social" correspond aux pôles de compétences majeurs d'Anne-Sophie Lapix. Esprit d'investigation et goût du terrain l'ont donc poussée vers le journalisme.
Pôle "Investigateur" : apprendre, réfléchir, chercher, comprendre sont les mots-clés de ce pôle. Il caractérise des personnes qui aiment raisonner, résoudre des problèmes complexes, rechercher des informations pour comprendre leur environnement. Elles éprouvent le besoin d'étudier et de se former et sont attirées par ce qui est d'ordre intellectuel ou scientifique.
Pôle "Réaliste" : réaliser, concrétiser, esprit technique, expérimentation correspondent à ce pôle. Il concerne des personnes qui ont besoin d'appliquer ce qu'elles apprennent. Elles peuvent avoir des capacités manuelles, sportives ou techniques et sont attirées par le terrain.
Pôle "Social" : c'est celui du contact, de la communication, de la transmission. Il révèle un bon sens relationnel et correspond souvent à des personnes qui ont besoin de se sentir utiles. Elles veulent exercer un métier tourné vers les autres, utile à la société...
Son profil, son métier...
Avec un tel profil, Anne-Sophie Lapix aurait pu devenir ingénieure, chercheuse de terrain ou se diriger vers les métiers de la santé. Des pôles dominants qui correspondent aussi au parcours de journaliste. En effet, c'est d'abord le pôle "Investigateur" qui se détache. Il explique sa formation initiale scientifique avec un bac C ( bac S maths aujourd'hui) puis ses études à l'IEP de Bordeaux et dans une école de journalisme. Un choix d'études qui montre un goût d'apprendre et de raisonner.
Le pôle "Investigateur" dénote un attrait pour enquêter et traduit un besoin de comprendre son environnement. Le plaisir de se cultiver, le débat d'idées et l'esprit critique se trouvent derrière ce pôle de la réflexion. Si la combinaison IR se retrouve dans de nombreux profils scientifiques, le pôle "Réaliste", avec la dimension "terrain", s'exprime dans les résultats de la journaliste, qui a été pigiste en presse quotidienne régionale et a présenté des émissions de reportages et d'investigation. Ce pôle "Réaliste" correspond aussi à son côté sportif et à son intérêt pour la nature et l'océan.
Le pôle "Social" qui complète son profil est bien sûr essentiel pour une présentatrice télé. Il indique un besoin de se sentir utile dans son métier et de transmettre aux autres.
Clothilde Hanoteau