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Témoignage

Voyages humanitaires et solidaires : comment éviter de tomber dans le volontourisme ?

Avant d'effectuer un voyage humanitaire, renseignez-vous bien auprès des organismes etvdes sites institutionnels.
Avant d'effectuer un voyage humanitaire, renseignez-vous bien auprès des organismes etvdes sites institutionnels. © MaxK / Adobe stock - Généré à l’aide de l’IA
Par Marie Frumholtz, mis à jour le 20 novembre 2024
5 min

Sur les réseaux sociaux, les offres de voyages "solidaires" voire "humanitaires" pullulent, promettant aux jeunes d'allier tourisme et aide aux populations locales. En réalité, ces organismes alimentent le "volontourisme" et toutes les conséquences négatives qui en découlent.

"Fin 2021, je suis partie un mois au Togo, raconte Emma. J'ai travaillé avec des enfants sans avoir les compétences ou la formation. Je me sentais immature et impatiente, mon sentiment d'imposture était énorme." Dès son arrivée sur place, l'étudiante partie pour faire un voyage solidaire pendant une année de césure, déchante.

"L'argent que nous avions versé avant notre départ devait couvrir les frais de scolarité et de santé des enfants du village, mais lorsque l'on voulait contacter l'un des dirigeants de l’association pour emmener un jeune avec un staphylocoque au dispensaire, silence radio... Aucun fonds n'était débloqué."

Emma a aussi réalisé que les animateurs censés les encadrer sur place étaient sous-payés par rapport au salaire minimum du pays. "A part appâter des gens sur les réseaux sociaux avec des photos d'enfants, l'association ne servait à rien, elle n'avait même pas de site internet", souligne-t-elle.

Le volontourisme, un secteur très lucratif

Comme Emma, de nombreux jeunes qui souhaitent associer vacances et aide aux populations locales tombent dans le volontourisme. Il s'agit d'activités financées et réalisées par des "bénévoles" ou des "volontaires" sans que cela profite à l’intérêt général. L’entreprise organisatrice a souvent pour seul but de gagner de l'argent sur le dos de touristes qui pensent sincèrement s'engager pour le bien commun. Aujourd'hui, la valeur du volontourisme dans le monde est estimée à 2 milliards de dollars, selon un rapport de l'ONU.

Si pour les volontaires, les conséquences se limitent le plus souvent au plan financier et à un gros sentiment de frustration qui peut peser sur le moral, les effets du volontourisme peuvent être désastreux pour les populations locales. Les activités que les touristes-bénévoles effectuent gratuitement empêchent les locaux de travailler. En donnant des cours d'anglais, par exemple, ce sont des postes de professeurs locaux qui sont occupés. Amener des fournitures scolaires avec soi pour les donner aux enfants est aussi défavorable au commerce sur place.

C'est ce qu'a constaté Céline, partie trois semaines au Burkina Faso il y a une quinzaine d'années : "On s'est rendu compte avec les autres bénévoles que le directeur de l'école revendait les fournitures que l'on avait apportées pour les enfants sur le marché noir..." La lycéenne qu'elle était avait dû faire du soutien scolaire sans aide ni matériel.

Trafic d'êtres humains

Plus dramatique encore : certaines organisations sont à l'origine de véritables trafics d'êtres humains. "L'ONG Friends International a enquêté sur la création de faux orphelinats et montré qu'il y en avait de plus en plus dans les zones touristiques, alors que ce n'est pas là que sont les besoins", explique Clarisse Bourjon, responsable reconnaissance et valorisation, chargée des relations institutionnelles chez France Volontaires.

Des enfants sont arrachés à leurs familles pour "occuper" les touristes de passage. Quant aux vrais orphelins, voir défiler tous les 15 jours de nouveaux adultes chargés de s'occuper d'eux, peut provoquer chez eux des troubles psychologiques et un sentiment d'abandon décuplé.

Ne pas se voir comme un sauveur

Partie dans les années 2000 alors que ce type de tourisme était en plein essor, Céline reconnaît avec le recul qu'elle a eu le complexe du "white savior" ("sauveur blanc" en français, ndlr), qui consiste chez les Occidentaux à penser qu'ils sont capables de sauver le monde.

"Nous avions fait avec les enfants un exercice de classification de fruits et légumes, mais certains leur étaient inconnus car il n'y en avait pas dans leur pays et nous ne le savions pas. On est arrivé avec notre vision des choses, sans chercher à comprendre leur culture." Ce type de situation peut être violent pour les locaux et créer des situations de tensions.

Comment s'assurer du sérieux d'un voyage solidaire ?

Avant de partir à l'aventure, mieux vaut donc se renseigner un maximum sur son organisme d'accueil (ses modes de financement, le parcours de ses dirigeants, etc.) et surtout sur le pays où on souhaite aller. Il faut s'assurer que l'impact de sa mission n'est pas négatif pour les populations locales et surtout que ses objectifs ont été déterminés avec elles.

Une mission à laquelle on peut s'inscrire en quelques clics, sans condition de diplôme ni préparation avant le départ, doit déjà alerter. "Les secteurs du développement et l'humanitaire sont très professionnalisés, ces missions ne s'improvisent pas", insiste Clarisse Bourjon.

Faire appel à des organismes reconnus

La solution la plus simple pour ne pas tomber dans le volontourisme reste encore de passer par des sites institutionnels ou des organismes dont les critères de sélection et le suivi sont encadrés. Par exemple :

  • France Volontaires

  • Des missions encadrées par Erasmus+

  • L'agence du service civique

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