La "nouvelle université de Nantes", telle qu'elle avait été imaginée par l'université actuelle et Centrale Nantes, ne verra finalement pas le jour. C'est le conseil d'administration de l'école d'ingénieurs qui en a décidé ainsi, vendredi 7 juillet au soir, par 20 voix pour, quatre contre et une abstention.
Centrale met fin au projet de rapprochement avec l'université de Nantes, qui prévoyait que l'école devienne un pôle de l'université, absorbant la faculté de sciences et techniques, mais aussi Polytech Nantes et trois IUT, comme l'avait dévoilé EducPros le 30 janvier 2017. Elle se retire ainsi du projet Isite.
Pas de compromis trouvé
Contacté par EducPros, Arnaud Poitou, directeur de l'école, explique les raisons de ce vote. "Ce que nous avions voté lors du conseil d'administration du 3 février, de façon conjointe avec l'université, n'est plus partagé. De plus, nous échangeons depuis l'obtention de l'Isite, il y a quatre mois, que ce soit en groupes de travail ou Olivier Laboux et moi-même. Nous n'avons pas pu converger vers un compromis, malgré des propositions de solutions alternatives. D'où la décision de ne pas engager notre établissement dans un projet qui hypothéquerait son avenir", détaille le directeur de Centrale Nantes.
Un premier coup de frein avait été donné début juin. Comme l'école d'ingénieurs l'avait alors expliqué dans un communiqué, la raison du blocage résidait en grande partie dans la question du rattachement des personnels du futur pôle : qui serait leur employeur ?
Parmi les "solutions alternatives" proposées par Centrale Nantes, figurait notamment la possibilité de différer le rattachement des personnels de l'université actuellement en poste, afin de prendre le temps de l'adaptation. Une solution qui ne convenait pas à l'université, celle-ci souhaitant demeurer l'employeur des 1.500 personnels du futur pôle, la gestion des ressources humaines étant alors assurée par la future École centrale de Nantes.
L'université se déclare "sans voix"
De son côté, l'université a réagi à la décision de Centrale Nantes de quitter le projet via une lettre à ses personnels, publiée vendredi 7 juillet 2017 à 21 heures. "L'École centrale décide unilatéralement de sortir du projet. Bien évidemment, après des mois de travail et d'investissement, une telle décision nous laisse sans voix", y écrit Olivier Laboux, le président de l'établissement.
"L'État et les collectivités m'ont immédiatement fait part de leur soutien et de leur souhait de continuer à nous accompagner dans la mise en place d'un nouveau modèle d'université à Nantes", précise-t-il, ajoutant que les fondateurs du projet Isite, les partenaires et les collectivités se réuniraient rapidement pour "évoquer ensemble les pistes d'évolution sans l'École centrale de Nantes". Contactée par EducPros, l'université n'a pas souhaité communiquer davantage sur le sujet pour le moment.
Des collaborations qui perdureront
Les deux établissements désirent, malgré tout, faire perdurer leurs collaborations, notamment sur leurs deux UMR communes, le LS2N (Laboratoire des sciences du numérique et de Nantes) et le GEM (Institut de recherche en génie civil et mécanique).
"Les liens entre l'école et l'université continuent d'exister, notre coopération s'inscrit malgré sur la durée : nous avons des projets et des laboratoires communs. Je reste convaincu que les relations entre grandes écoles et universités doivent se renforcer. Néanmoins, lorsqu'un projet n'est pas réalisable, il faut en prendre acte", déclare Arnaud Poitou.
Ce rapprochement, stoppé quelques mois à peine après son lancement, était pourtant souvent cité en exemple par d'autres regroupements. Mais les questions de gouvernance et de structure auront finalement eu raison de lui.
Dans une tribune publiée le 7 juillet 2017, quelques heures avant le conseil d'administration de Centrale Nantes, une quarantaine de chercheurs nantais ont appelé au maintien du rapprochement. "Un arrêt serait catastrophique pour tous les laboratoires du site et pour la recherche du territoire en général. Ce projet propose une révolution organisationnelle très forte [...]. Nous demandons aux partenaires de tout faire pour mettre en œuvre, sans plus attendre, le projet scientifique pour lequel nous nous sommes battus pendant plusieurs mois. Nous leur demandons de ne pas prendre de décision isolée et hâtive qui pénaliserait collectivement toute la communauté scientifique nantaise et l'image du territoire tout entier", écrivent-ils dans ce document.
Ils estiment en outre que le rapprochement serait "une opportunité unique qui [leur] est enfin offerte de mettre en commun les forces scientifiques locales vers des projets résolument novateurs et de très grande envergure". Malgré leur engagement pour ce projet, leurs voix n'ont finalement pas été entendues.