L'année 2015 aura été marquée par les attentats. D'abord ceux de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher en janvier, puis ceux de Paris et de Saint-Denis en novembre.
Touchée au cœur, la communauté universitaire a massivement manifesté sa solidarité et son émotion. Que ce soit par communiqués de presse, messages de soutien sur les réseaux sociaux ou encore par des rassemblements. Avec, en étendard, les valeurs de liberté et de tolérance.
Les Débats de l'après-Charlie
Après la vague d'émotion et l'expression de la solidarité de la communauté universitaire, s'est très vite posée la question de l'action : quelle suite donner à Charlie Hebdo ?
Si un grand nombre d'établissements a opté pour des conférences-débats autour de la liberté d'expression à Créteil, du rôle de l'État à Sciences po Lille, ou encore du vivre-ensemble à Paris 13, d'autres ont préféré attendre d'avoir plus de recul pour organiser de tels échanges. À l'instar de Marseille, où l'après-Charlie a davantage relevé d'initiatives individuelles que d'une démarche institutionnelle. Mais assez vite, la mobilisation retombe.
Dès le 22 janvier, dans le cadre de la "Grande mobilisation de l'école pour les valeurs de la République", la ministre de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Najat Vallaud-Belkacem, sollicite l'enseignement supérieur. Parmi les missions qui lui sont assignées, la formation des enseignants aux valeurs de la République et "plus particulièrement à la laïcité et à la lutte contre les préjugés" dans le cadre des Espé, arrive en première ligne.
Les attentats ont, en effet, souligné le manque de formation des enseignants à cette question. Michel Lussault, président du Conseil supérieur des programmes, partage l'avis de la ministre. Pour lui, "la question de la laïcité n'a pas été suffisamment investie au cours des dernières décennies et les enseignants ne sont pas bien armés pour répondre aux questions de leurs élèves". Nicolas Cadène, rapporteur général de l'Observatoire de la laïcité, suggère que la formation des enseignants à la laïcité soit assurée non pas par des religieux mais par des experts du fait religieux (chercheurs, universitaires, intellectuels)".
Les D.U. Laïcité se multiplient
Autre conséquence des attentats du début d'année : les formations à la laïcité s'installent à l'université sous l'impulsion le ministère de l'Intérieur. À l'automne 2015, sept nouveaux DU (diplômes universitaires) ont vu le jour. Loin de se limiter aux aumôniers, ces formations visent un public beaucoup plus large.
La question de la laïcité s'est également imposée à l'université à travers celle du port du voile. Sur cette question, l'Observatoire de la laïcité s'est clairement prononcé en décembre contre son interdiction, arguant du fait que : "La laïcité vise à garantir la liberté de conscience de tous les usagers, mais certainement pas leur neutralité."
13 novembre, et après ?
Au lendemain des attentats à Paris et à Saint-Denis en novembre, l'émotion est de nouveau très forte dans la communauté universitaire. Le hashtag #universitédebout connaît une incroyable diffusion virale. Un mot-dièse dont l'initiative ne revient pas à des utilisateurs ordinaires de Twitter, ni même à des étudiants bouleversés par la tragédie et en quête de mobilisation, mais au président de la Conférence des présidents d'universités (CPU), Jean-Loup Salzmann. Une mobilisation d'autant plus forte que des enseignants du supérieur et des étudiants faisaient partie des victimes.
Et maintenant, s'interrogent les responsables de l'enseignement supérieur, quel rôle doit jouer l'université ? Pour Axel Kahn, il y a urgence à ce que le fait religieux soit enseigné à l'université. Selon Bernard Belletante (EM Lyon), il faut "donner aux étudiants des clefs pour comprendre la société dans laquelle ils évoluent", quant à Pascale Ribon (Estaca), "il faut aider les jeunes à se forger un esprit critique, à décoder ces événements, à ne pas tomber dans le piège des discours extrémistes".