En 2015, le gouvernement a reporté le projet d’un nouvel arrêté à la suite des protestations des différentes organisations intéressées. Un an plus tard, le texte publié le 27 mai au Journal officiel et applicable dès la rentrée 2016 essaie de prendre en compte les diverses situations des doctorants, mais la Confédération des jeunes chercheurs (CJC) est toujours insatisfaite. Elle déplore que le texte ne considère toujours pas le doctorat comme une expérience professionnelle, contrairement à la loi de 2013 dont il est issu.
Six ans au maximum
Même si, en pratique, la durée de la thèse se rapprochait de plus en plus d’une standardisation autour de trois à cinq ans, les textes officiels ne fixaient, jusqu’ici, qu’une durée générale des thèses à trois ans. Le nouveau texte précise que ces trois ans sont "en équivalent temps plein consacré à la recherche".
Grande évolution : le seuil maximum de six ans. Il met fin officiellement à la pratique de thèses longues prisées autrefois, essentiellement dans les sciences humaines et sociales. Les doctorants pourront faire valoir différents congés (maternité, parentaux, maladie…) pour prolonger la durée de leur doctorat. Les doctorants handicapés pourront aussi y avoir droit.
Le texte prévoit également une nouveauté très en vogue à l’université en ce moment : l’année de césure pendant laquelle le doctorant peut avoir une activité différente de sa thèse. Même si le texte précise le caractère exceptionnel de ce break, c’est l’un des aspects du texte qui fait bondir la CJC.
Le rôle des écoles et collèges doctoraux conforté
Le ministère a cherché à préciser le rôle des écoles doctorales dans l’encadrement des doctorants. Ces structures agissent maintenant officiellement sous la responsabilité des établissements.
La composition du conseil de l’école doctorale ne change pas beaucoup, le texte donnant une majorité assurée (60 %) aux représentants de l’établissement, mais il est maintenant clair que les doctorants membres de celui-ci sont élus par leurs pairs.
En plus du rôle de formation habituel des écoles doctorales, l’arrêté met l’accent sur l’importance d’une formation à l’éthique de la recherche et à l'intégrité scientifique. Les écoles doctorales devront aussi mettre en place une démarche d’évaluation de leurs cursus et formations à l’aide d’enquêtes auprès des doctorants.
Autre changement : la mise en place d’un "portfolio du doctorant" rassemblant les activités du doctorant durant sa formation.
Un comité de suivi individuel
Alors que de trop nombreux doctorants se plaignent de difficultés dans leur relation de travail avec leur directeur, l’arrêté officialise le rôle des comités de suivi individuel du doctorant (déjà mis en place par certaines écoles doctorales), jouant le rôle de tiers veillant au bon déroulement de la thèse. Cette structure nouvelle permettra, peut-être, d’éviter certains conflits et servira de possible lanceur d’alerte sur d’éventuels discriminations ou harcèlements.
Changement assez étonnant dans le déroulement de la délibération de la thèse, le nouvel arrêté prévoit que la direction de la thèse sera membre du jury mais n’aura plus le droit de vote.
Enfin, le jury doit "permettre une représentation équilibrée des femmes et des hommes", formulation qui ne dit pas à quel pourcentage de femmes le jury devient équilibré, laissant la possibilité qu’il ne soit pas totalement paritaire.
Le contrat doctorat qui devrait être publié d’ici à l’été devrait également apporter de nouvelles précisions.
Pour la CJC, le texte publié la semaine dernière n’a pas évolué dans un meilleur sens. "C’est même pire par certains aspects. On a vu l’introduction d’éléments qui vont à l’encontre du doctorat comme expérience professionnelle, notamment l’année de césure ou encore le portfolio qui n’est ni plus ni moins qu’un CV dont on se demande ce que ça fait dans un arrêté."
Les jeunes chercheurs de la CJC "n’ont absolument pas l’impression d’avoir été entendus puisque la CJC a proposé pendant les deux ans de concertation des propositions d’amélioration et voit que le résultat est très loin de ses attentes. Nous nous étonnons d’être sortis de notre rendez-vous avec Thierry Mandon avec des espoirs et d’être maintenant extrêmement déçus par ce ministère qui ne nous écoute pas. On est très loin des objectifs de la loi de 2013 qui rappelait que le doctorat était une expérience professionnelle".
La CJC se dit aussi inquiète du contenu du prochain texte sur le contrat doctoral qui devrait être publié cet été. "Il y est annoncé sous forme de simplification la possibilité que les missions doctorales soient possibles hors du contrat doctoral (essentiellement les vacations). Ce qui dévaloriserait le contrat doctoral. À force de simplifier, on finit par tout casser."