Dans le café situé à l'entrée du campus, la file d'attente ne désemplit pas. Lieu de détente, espace de réunion, salle de travail, l'Anticafé est devenu le centre névralgique de l'Innovation factory. Le cœur des machines, là où les projets naissent et se développent.
Au sein du "campus cluster Paris innovation", établi dans le 13e arrondissement de la capitale, les étudiants ont pris l'habitude de côtoyer les chefs d'entreprise et les startupers. À la cafétéria, mais également dans les espaces de travail partagés, sur 1.200 mètres carrés. Dans les salles ouvertes aux utilisateurs, l'équipement est numérique. Ordinateurs, tableaux connectés, une imprimante 3D et tout le nécessaire pour échanger à distance. Les nouveaux outils de l'ère numérique.
À la création, 300 entreprises consultées
Depuis quatre ans, l'Innovation factory se fixe pour objectif de favoriser les rencontres inattendues, casser les codes, afin d'accélérer la transformation numérique des entreprises. "À ce moment-là, les patrons prenaient tout juste conscience que l'impact du numérique sur leur activité n'allait pas se cantonner à la création d'un site web, se souvient Anne Lalou, fondatrice du cluster et de l'école de management numérique Web School Factory. Ils avaient besoin d'un lieu de rencontre, pour échanger avec l'écosystème de l'innovation."
L'entrepreneuse, passée par les entreprises du CAC 40, réunit alors dans un amphithéâtre plus de 300 chefs d'entreprises, "à la mode américaine", et leur présente le projet. "Nous nous sommes dits : si dix d'entre eux sont partants, on y va !" En une soirée, un noyau dur de partenaires se forme. L'Innovation factory voit officiellement le jour, accolée de façon étroite à la Web School Factory.
Les étudiants, en posture d'experts
Quatre ans plus tard, 35 entreprises sont partenaires de la structure, au statut associatif et à but non lucratif. On y trouve des grands groupes, à l'image d'Accor et de Sodexo, des ETI (entreprises de taille moyenne), des start-up et même un fonds d'investissement, Partech ventures. Chacun s'acquitte d'un ticket allant de quelques milliers d'euros à plusieurs dizaines de milliers d'euros, pour un partenariat de trois ans. "Tous y trouvent un intérêt différent", constate Anne Lalou.
Notre présence nous permet de nous confronter aux millenials et de voir si ce que l'on imagine est en accord avec leur manière de vivre.
(T. Cressot)
"Au-delà de la classique mise en relation avec des étudiants, nous venons chercher ici un regard neuf et critique sur nos projets de développement", détaille Thomas Cressot, responsable du "guest innovation lab" d'Accor Hotels. Le groupe hôtelier, membre fondateur de la "factory", participe au jury de sélection de l'incubateur maison et apporte régulièrement des projets, sur lesquels les étudiants de la Web School factory sont invités à se pencher. "Il s'agit en quelque sorte d'ouvrir nos chakras, de nous confronter aux millenials et de voir si ce que l'on imagine est en accord avec leur manière de vivre", poursuit le professionnel.
Dernier exemple en date ? Dans le cadre d'une "anti-master class", des membres d'Accor Hotels ont présenté aux étudiants des projets visant à améliorer et faciliter l'utilisation des points de fidélité par leurs clients. Les élèves ont commenté, critiqué et estimé la cohérence des produits. "Ces échanges nous ont permis de faire évoluer notre idée de départ, puis notre offre", résume Thomas Cressot.
Place au pragmatisme
Si les entreprises viennent puiser au sein de l'Innovation factory des idées et un souffle nouveau, le contrat de départ est clair : "Nos étudiants doivent y trouver un intérêt pour leur parcours et il n'y a aucune obligation de résultat", prévient Anne Lalou. L'échec fait donc partie du jeu. "C'est le propre de l'esprit start-up, abonde Thomas Cressot. Les jeunes ne sont pas là pour remplacer une société de conseil."
Beaucoup de sociétés sont là pour recruter des étudiants. Et ça tombe très bien, nous en avons !
(A. Lalou)
Mais l'esprit start-up, c'est également savoir faire preuve de pragmatisme. "Beaucoup de sociétés sont là pour recruter des étudiants, constate la directrice de l'Innovation factory. Et ça tombe très bien, nous en avons !" Si les élèves des écoles installées sur le campus (Web School factory, Paris school of Business et l'IICP, école de communication et de journalisme de Paris, toutes membres du groupe privé Galileo-Studialis) représentent le gros des troupes, l'Innovation factory attire désormais d'autres établissements.
"Troupe d'élite du digital"
C'est le cas de CentraleSupélec. L'école d'ingénieurs, dont les locaux sont situés sur le plateau de Saclay, accueille dans le 13e arrondissement ses étudiants inscrits dans la filière DTY (digital tech year). Créé il y a un peu plus de deux ans par la chaire d'innovation digitale de l'établissement, le cursus DTY forme pendant un an une poignée d'élèves, pour en faire une "troupe d'élite du digital", sourit Armelle Hellara, responsable du développement et du pilotage de DTY.
Avant de partir six mois en stage, la vingtaine d'élèves, sélectionnée après un entretien de motivation, planche sur des projets fournis par des entreprises durant un semestre. L'objectif ? Apporter aux partenaires industriels une solution technique à leur problème. Une équipe a entre autres travaillé sur le design d'un bracelet connecté destiné aux personnes âgées. "Nous trouvons au sein de l'Innovation factory de nouvelles formes pédagogiques, un travail collaboratif, ainsi que tout un écosystème favorisant les rencontres, qui ne sont pas présents sur notre propre campus", concède Armelle Hellara.
En retour, l'école d'ingénieurs apporte au cluster sa compétence en ingénierie, permettant aux entreprises partenaires de "bénéficier d'une continuité de services", souligne Anne Lalou. Réflexion sur le produit, conception de ce dernier, production, puis déploiement sur le marché... Grâce aux étudiants aux profils variés présents sur le campus, l'Innovation factory fait la promesse aux entreprises de repartir des lieux avec toutes les cartes en main, pour entamer ou poursuivre leur transformation numérique.
Design thinking, espace de coworking, learning lab, fablab, classe inversée, évaluation par les pairs, gamification... Il n'est pas toujours facile de s'y retrouver parmi ces termes frenglish qui se ressemblent parfois. D'autant que l'absence d'études claires et reconnues ne permet pas d'assurer la réelle valeur ajoutée de ces pratiques parfois compliquées à mettre en place.
Jeudi 27 avril, EducPros vous propose un tour d'horizon de ces pratiques par le témoignage direct de ceux qui les font et les analysent : professeurs, chercheurs, consultants et même étudiants.
Un atelier tenu par des professionnels du design participatif vous permettra d'expérimenter directement l'agilité des procédés collaboratifs.
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