L'UPEC (université Paris-Est Créteil) et l'UPEM (université Paris-Est Marne-la-Vallée) l'ont annoncé par communiqué le 18 février 2014 : les deux universités franciliennes souhaitent passer à la vitesse supérieure et se diriger vers une fusion, qui interviendrait en parallèle du développement du PRES Paris-Est avec les grandes écoles et les organismes de recherche au sein d'une Comue (communauté d'universités et établissements).
Les conseils d'administration des deux établissements se sont ainsi prononcés en faveur d'une "structuration de l’enseignement supérieur et de la recherche de l'est francilien, en faisant l’hypothèse du choix stratégique suivant : pérenniser la Comue Université Paris Est qui sera le coordinateur territorial, et créer, dans ce cadre, une nouvelle université par la fusion de l’UPEC et de l’UPEM".
"Le consensus a émergé sur la nécessité d'aller plus loin dans notre travail en commun, décrit Gilles Roussel, président de l'UPEM. Mais il ne s'agit que du début d'un processus : nous sommes au stade de la demande en mariage, il va ensuite falloir déterminer ensemble les termes du contrat, ses modalités, le calendrier, etc."
La fusion, une "progression naturelle"
Une alliance gouvernée, pour les présidents, par un souci d'efficacité. "Nous nous sommes rendus compte, dans nos projets communs les plus aboutis comme l'institut d'urbanisme, que nous butions sur différents freins. Avoir deux établissements ajoute une complexité dans les processus de décision, de pilotage, de stratégie. Il faut absolument simplifier le mille-feuille avec une seule structure. Certains nous demandent d'ailleurs : pourquoi ne fusionnons-nous pas tout de suite ?", sourit Gilles Roussel.
"Nous avons déjà sept laboratoires communs, trois Labex, une SATT où nos équipes collaborent, nos écoles doctorales au niveau du PRES... Nous travaillons depuis deux ans sur une offre de formation commune en licence et en master, détaille également Luc Hittinger, président de l'UPEC. Pour structurer au mieux l'Est francilien pour nos étudiants, dans un souci d'efficacité, d'attractivité et de visibilité, un seul établissement constitue une progression naturelle et une forte plus-value."
Il faut absolument simplifier le mille-feuille avec une seule structure (G.Roussel)
La démocratie en danger ?
Des arguments cependant loin d'être convaincants pour l'enseignant Gérard Tollet, secrétaire de section du Snesup (syndicat national de l'enseignement supérieur) à l'UPEC. "Ce vote est extrêmement prématuré et inquiétant pour les personnels", estime le responsable, qui défend une poursuite de la coopération entre universités en optant pour l'association entre les deux facs, "où chacune conserve son autonomie". "C'est moins dangereux pour la démocratie, qui sera mise à mal par l'éloignement des centres de décision. Sans oublier le risque évident de créer un ensemble ingérable avec la fusion. Mais surtout, cela sera tout aussi intéressant pour poursuivre et développer les coopérations", suggère-t-il.
"Le mot fusion provoque toujours des inquiétudes, contrebalance Luc Hittinger. Mais il s'agit d'abord de créer un nouvel établissement, qui conservera le statut d'EPSCP (Etablissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel), donc d'un point de vue démocratique, je ne pense pas que cela change quoi que ce soit."
Une fusion pour faire des économies ?
Le responsable syndical déplore également la motivation première qui gouverne ce choix d'après lui. "Cette fusion s'inscrit d'abord dans une logique d'économies, fustige-t-il. Et ce, au détriment de la qualité de l'enseignement et de la recherche, avec des déplacements d'étudiants, d'enseignants et de personnels administratifs à venir."
"L'objectif n'est clairement pas de faire des économies, contredit de son côté Gilles Roussel (UPEM). Toutes les fusions qui ont eu lieu montrent d'ailleurs que dans un premier temps, cela implique d'abord des coûts". "Si notre souci était budgétaire, nous irions au casse-pipe", renchérit Luc Hittinger.
Quant à la crainte exprimée par certains de voir Marne tenter d'éponger ses déficits auprès de Créteil, Gilles Roussel assure que ce n'est aucunement d'actualité. "Nous avons bien l'intention de régler les choses avant toute fusion car ce serait un facteur de déstabilisation du nouvel établissement. Nous comptons être de retour à l'équilibre d'ici là, et nous sommes déjà engagés dans cette dynamique", promet-il.
Il y a un risque évident de créer un ensemble ingérable avec la fusion (G.Tollet - Snesup)
La décision finale en juin 2014
Prochaine étape : l'heure sera à la "concertation" jusqu'au mois de juin 2014, où interviendra un vote des conseils d'administration sur "les résultats de ce travail" avec "le principe, les modalités, le calendrier et les étapes de mise en place de ces regroupements [fusion et Comue]", décrit le communiqué des deux établissements. Un travail qui s'inscrit également "dans la perspective du contrat de site que nous présenterons en juin, pour 2015-2019", précise Gilles Roussel.
"Je crains qu'il n'y ait pas de véritable concertation car le scénario semble écrit d'avance, se désole Gérard Tollet (Snesup). Une assemblée générale sera organisée début mars pour permettre le débat et informer les personnels, que nous sentons très inquiets dès qu'ils découvrent ce projet de fusion."
Les équipes gouvernantes espèrent de leur côté répondre à ces questionnements en précisant les contours du projet avec leurs communautés.
UPEC
- 30.000 étudiants
- 2.600 personnels (dont 1.600 enseignants, enseignants-chercheurs et chercheurs et environ 1.000 personnels Biatoss)
- 16 sites répartis sur 9 communes et 3 départements (94 : Créteil, Vitry-sur-Seine, Bonneuil-sur-Marne ; 77 : Torcy, Sénart, Melun, Fontainebleau ; 93 : Saint-Denis, Livry-Gargan).
UPEM
- 11.000 étudiants
- 1.100 personnels (dont près de 700 enseignants, enseignants-chercheurs et chercheurs, et environ 450 personnels Biatoss)
- 3 sites (Cité Descartes, Val d'Europe, Meaux)
La biographie de Gilles Roussel
La biographie de Luc Hittinger
Notre portrait d’université : Marne-la-Vallée ou la logique de site
L'interview de Bernard Saint-Girons, ancien président du PRES Université Paris Est : "Nous pouvons être le premier PRES francilien à se lancer dans un contrat de site"
Les billets de Pierre Dubois : Créteil : ça va mal aussi à l’UPEC ; Paris-Est MLV sur la paille !